Bon ok, à l'heure où j'écris ces lignes, il s'agirait d'un hoax. Je me disais bien aussi, Bruce Willis attaquant Apple...On aurait droit à quoi après ça ? A Stallone faisant son Juge Dredd face à Microsoft ? A Schwarzenegger demandant à Sony "tu connais Miranda ?". Non, même comme scénario d'Expendables 3 ça ne colle pas.
Pourtant, cette histoire, aussi farfelue soit-elle, a fait couler beaucoup d'encre au sujet du problème que pose ipognon. Parce que John MacCLane comptait soi-disant attaquer Apple au motif que ses milliers de chansons achetées sur itunes ne seraient pas cessibles à ses descendants le jour de sa mort. Et c'est marrant parce que fort peu de personnes ont vraiment réfléchi à la question de l'interaction du droit des successions avec celui des licences d’œuvres de l'esprit. Mais est ce vraiment pertinent comme question ? Cela met-il en lumière un aspect des droits d'auteur auquel personne ne s'est intéressé ?
Bon, sur la question de la licence, on connaît la chanson (oh oh), j'ai déjà beaucoup écrit à ce sujet, récemment sur Diablo et sur l'arrêt de la Cour de justice de l'union européenne qui traite de ce sujet. En résumé, la sacro-sainte licence, qui permet de contrôler l'utilisation que le licencié fera de l’œuvre de l'esprit, et qui donne juste un droit d'utiliser une oeuvre de l'esprit, mais aucun droit de propriété, pourrait bien échapper, depuis l'arrêt de la Cour, à la toute volonté du concédant de la licence. Et notamment, il serait possible de céder cette licence à autrui. Mais si vous lisez ma news à ce sujet, vous verrez que ce n'est pas si simple. Et aujourd'hui, en attendant qu'une réforme législative ait lieu ou que la justice se prononce définitivement, quand vous achetez une chanson sur itunes, vous n'achetez rien du tout en réalité.
Les conditions générales de vente et de service de itunes sont en effet très claires:
Vous acceptez que les Produits iTunes ne vous sont concédés que sous forme de licence.
Et ailleurs,
iTunes est le fournisseur du Service qui vous permet d’acheter ou de louer une licence pour des téléchargements de contenu numérique (les « Produits iTunes ») uniquement destinés à l’utilisateur final, selon les conditions générales décrites dans le présent Contrat
Et encore,
Vous êtes autorisé à utiliser les Produits iTunes uniquement pour un usage personnel et non commercialEt encore,Vous reconnaissez en outre que votre utilisation des Produits iTunes, qu’ils soient ou non protégés par une technologie de sécurité, est limitée à certaines règles d’utilisation fixées par iTunes et ses concédants (« Règles d’Utilisation ») et que toute autre utilisation des Produits iTunes peut constituer une violation des droits d’auteur.
Et encore,
En tant qu'utilisateur inscrit au Service, vous pouvez créer un compte (« Compte »). Vous ne devez révéler à personne les informations relatives à votre Compte.
C'est quand même clair et pour l'instant, l'utilisateur d'itunes n'est pas propriétaire des musiques qu'il "achète". Il ne peut donc ni les revendre, ni les prêter, ni les louer, ni rien en faire en réalité, à part les écouter, et encore, que sur cinq appareils.
Mais alors, qu'en est-il du droit des successions ? Peut-il léguer son compte itunes à ses héritiers ?
Eh bien la réponse est également non. Tout simplement parce que le défunt n'était pas propriétaire d'un bien incorporel mais d'une licence d'utilisation. Et que l'on ne peut céder à ses héritiers que ce que l'on possède. La licence ne prévoyant pas le cas des successions, voire prohibant d'une façon toute générale la transmission des codes du compte à quiconque, les héritiers ne peuvent récupérer ces derniers et les utiliser sans violer la licence.
D'ailleurs, les CGV d'itunes le disent sans détour: iTunes est le fournisseur du Service qui vous permet d’acheter ou de louer une licence pour des téléchargements de contenu numérique (les « Produits iTunes ») uniquement destinés à l’utilisateur final.
Et l'utilisateur final, c'est celui qui s'est vu octroyer la licence : pas ses héritiers. Par conséquent, tout ce buzz bidon autour de Bruce Willis qui découvrirait que ses héritiers ne pourraient pas bénéficier du compte de leur papa n'a pas grand intérêt. Sauf à ajouter au fait que l'on ne peut ni revendre, ni prêter, ni louer une œuvre de l'esprit téléchargée, le fait qu'on ne puisse pas non plus la transmettre à ses héritiers.
Vivement que le législateur ou le juge vienne définitivement régler la question.
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