Erreur d'impression, "braconnage" de numéro de série dans les usines, vendeurs indélicats… dans le passé, vous aviez parfois acheté un jeu, mais pas obtenu de numéro de série. Aujourd'hui, joie du monde dématérialisé, c'est souvent le contraire.
Depuis quelque temps, on trouve des dizaines de sites internet vendant à des prix défiant toute concurrence des "clés" de jeux PC. Lorsqu'on regarde en détail ces offres à prix cassés, on croit rêver.
Dans le meilleur des cas (rarement le plus intéressant du point de vue tarif), il s'agit d'une clé Steam ou Origin : il suffit de la fournir sur la plateforme en question pour télécharger et installer son jeu. Très souvent, il s'agit d'une clé venant d'une version russe. Quelquefois, le site qui vend la clé fournit un mode d'emploi (à coups de téléchargement de packs de langues et de tripatouillages divers dont une partie sous regedit), mais souvent il se contente d'indiquer texto "Ceci est une clé russe. Vous devez trouver un moyen de la convertir dans votre langue" et à vous les joies des forums interlopes. Mais il y a encore mieux : le site qui vous vend une clé en vous indiquant "Aucune plateforme de téléchargement n'est associée à ce produit et nous ne fournissons aucun service de téléchargement". Autrement dit, vous avez la clé, démerdez-vous pour dégotter le jeu : soit vous avez un copain qui a le DVD, et vous l'installez avec votre clé ; soit vous devez trouver une version copiée illégalement sur le Net, et l'utiliser avec votre clé légale.
Personnellement, par principe, je serai toujours du côté du client-joueur : à partir du moment où la clé vendue est légale (ce qui est le cas la plupart du temps), c'est-à-dire que quelque part à l'autre bout de la chaîne le développeur est rémunéré, ça me va. Mais il faut bien comprendre qu'il s'agit d'un achat assez risqué pour le client : comme sur un marché aux puces, ce dernier peut aussi bien faire une super affaire qu'être victime de faussaires, recéleurs et autres arnaqueurs. Les clés peuvent être fausses, vendues deux fois, annulées du jour au lendemain. Quant aux manipulations nécessaires pour changer la langue, elles sont délicates et peuvent conduire à des problèmes.
Pour les revendeurs indépendants sérieux, la pilule doit être amère. En plus des éditeurs qui imposent des prix de gros supérieurs à ceux des magasins, et de la concurrence légale des enseignes anglaises profitant de la faiblesse de la livre Sterling, voilà une concurrence parfaitement déloyale : quand on paye la TVA et les charges, qu'on se dote d'un service après-vente et de garanties pour le client, on ne peut pas proposer un Battlefield 3 à 18 euros.
Ou alors, il faut créer un magasin-alibi pour bénéficier des prix revendeurs "physiques"; installer la société au Luxembourg pour les charges et la TVA réduites ; puis ouvrir les boîtes de jeux et scanner les clés d'activation afin de les revendre en tant que versions "numériques"; le tout via un site internet anglais afin de profiter du taux de change de la livre Sterling en ce moment. Ne rigolez pas, je parie que certains le font déjà.
***Cette chronique est extraite du numéro 244 de "Canard PC", paru le 15 novembre 2011. Retrouvez la rubrique "Au coin du jeu" dans chaque numéro, ou presque.
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