Le droit, pour vous, c'est un labyrinthe confus de lois incompréhensibles où vous avez tôt fait de vous perdre comme une souris affolée, avant de vous faire dévorer par le Minotaure judiciaire. C'est moche. Aussi, n'écoutant que ma pitié, je vous propose de découvrir une nouvelle entrée du dictionnaire juridique, sur la propriété intellectuelle.
Mais comment est née une telle notion ? Déjà, nous pouvons écarter le complot maçonnique. En effet, si les francs-maçons sont fortiches, c'est en propriété intellectruelle.
Écartons également l'hypothèse d'une conspiration politique, qui concerne la propreté intellectuelle, celle que l'esprit bien pensant de notre siècle voudrait imposer à tous, au point que ça ne me choquerait pas que les insultes dans nos pensées soient bipées, mais je dois dire qu'aujourd'hui plus rien ne m'étonne.
En revanche, n'hésitons pas à incriminer le lobby des artistes. Comment cela peut-il se faire ? Et bien posez-vous ces simples questions. Les artistes, ne se pensent-ils pas volontiers comme des gens très intelligents ?
Et ne sont-ils pas très attachés à leur villa de 12 chambres avec piscine ?
Et en parlant de gens intelligents attachés à leur villa, ne pourrions-nous dire que ce sont des intellectuels attachés à leur propriété ?
Puisque vous aurez immanquablement répondu oui à ces interrogations, vous aurez donc compris que, à l'origine donc, il s'agissait de sécuriser la propriété des pseudo- intellectuels en leur conférant des droits sur leurs créations.
Le droit de la propriété intellectuelle, c'est donc l'art de faire payer un maximum d'argent, plusieurs fois si possible, pour que le peuple puisse élever son âme en écoutant, lisant, ou regardant des produits, enfin, des oeuvres, comme "Le même soleil", "la Tarte et le Territoire" ou Avatarte.
Et comment assurer la propriété des artistes ?
Pour répondre à cette question, il faut se tourner vers la première partie du Code de la propriété intellectuelle, concernant la propriété littéraire et artistique (articles L. 111-1 à L. 343-7 du Code de la propriété intellectuelle).
Cet ensemble de règles octroie à nos amis artistes des droits oraux, c'est-à-dire le droit de dire des conneries, oh combien fondamental dans leur branche, et des droits patrimonio, puisque in vino veritas et que la mission des artistes est de nous ouvrir les yeux sur la réalité de notre condition humaine (*).
Mais, une fois que l'artiste a décidé de tenter sa chance, et qu'il est donc prêt à diffuser sa création au public, il faut, généralement, qu'il fasse appel à un éditeur, un producteur, enfin, quelqu'un qui a l'argent pour financer la production en masse de l'oeuvre. Il va donc céder à un tiers son droit d'exploitation de l'oeuvre, moyennant finance évidemment. Et d'ailleurs, pour que ces vils capitalistes d'éditeurs et de producteurs ne puissent pas priver les artistes du fruit de leur travail, le Code prévoit un ensemble de mesures visant à réglementer l'exploitation des oeuvres (articles L. 131-1 à L. 133-4). Et comment donc s'assurer de ce que l'auteur aura les fruits qu'il mérite ? Avec la recette évidemment ! Mais de quelle recette parle-t-il, vous vois-je vous demander. Accrochez-vous, vous allez voir, tout se tient: puisqu'il faut prévoir des recettes pour le fruit de l'artiste, ce qui est une conséquence des droits patrimonio comme je l'expliquais ci-dessus, et que le public est une bonne poire, il s'agira simplement de prévoir la recette de poire pochée au vin rouge ! Vous voyez bien qu'au fond, le droit c'est simple. Pour les détails des préparatifs, je vous renvoie principalement à l'article L. 131-4 du Code de la propriété intellectuelle, c'est délicieux (**).
Ensuite vient la question des droits des voisins de l'artiste (articles L. 211-1 à 217-3 du Code de la propriété intellectuelle). En effet, le monde de l'art étant fait de copinage, il était normal que l'on s'intéresse aux voisins des artistes, que l'on appelle artiste-interprètes (article L. 212-1 à 212-11), producteurs de phonogrammes ou vidéogrammes (L. 213-1), ou encore entreprises de communication audiovisuelle. (articles L. 216-1 à 216-2)
L'idée est de conférer à ces braves voisins des droits sur l'oeuvre de l'artiste. Par exemple, pour les producteurs de vidéogramme, ce n’est pas plus de 3 dans le sang (***)
Enfin, nous avons des articles sur la rémunération pour la copie privée, privée de tout d'ailleurs (articles L. 311-1 à 311-8). Il s'agit principalement de taxer les supports de stockage vierges pour redistribuer le produit de cette taxe aux artistes. Puis nous trouvons des articles sur les sociétés de perception et de répartition des droits, comme la SACEM (articles L. 321-1 à 321-13).
Ah, il y aurait tant à dire sur la SACEM. Saviez-vous par exemple pourquoi on l'appelle ainsi ? Parce que les artistes SACEM. SACEM beaucoup même. SACEM plus que ça n'aime les autres. La SACEM a ainsi pour mission de collecter les droits d’auteur et de les redistribuer aux créateurs. Chaque fois qu'il y a diffusion ou reproduction des oeuvres que gère la SACEM à la télé, à la radio, en concert, dans les bars, les lieux publics, elle perçoit de l'argent de la chaîne de télé ou de radio, des producteurs du concert, des propriétaires des bars, etc. qu'elle répartit après entre les ayant droits.
Donc, voyez-vous, chaque fois qu'une oeuvre est achetée ou simplement utilisée, elle génère de l'argent pour l'artiste.
Et pour faire le tour de la question, sachez que le Code contient les articles L. 331-1 à 343-7 sur la lutte contre le piratage. On retrouve la fameuse Hadopi, mais aussi les droits que peut avoir un acheteur d'oeuvres de les utiliser en famille, c'est aussi l'exception de copie privée, c'est la lutte contre la contrefaçon, autant de sujets que j'ai souvent traités. De toutes les façons, depuis 3 paragraphes, plus personne ne lit, alors bon, je ne vais pas me fatiguer à tout réexpliquer pour rien.
En résumé, la propriété intellectuelle c'est le bien. Mais reste une grande question qu'à ce jour, aucune jurisprudence n'a jamais résolue: la propriété intellectuelle est-elle vraiment l'inverse de l'indigence manuelle ? Je vous laisse méditer.
(*) Le lecteur astucieux aura compris qu'il s'agit en réalité des droits moraux (c'est à dire le droit au respect de son nom et de la qualité et de son oeuvre ainsi que le droit de décider de diffuser son oeuvre), et des droits patrimoniaux (le droit de représentation et de reproduction de l'oeuvre).
(**) Le lecteur ingénieux sait qu'en réalité, lorsque l'artiste décide de céder ses droits patrimoniaux à un éditeur ou un producteur, pour s'assurer de ce que l'artiste aura bien droit à une rémunération correcte, l'article L. 131-4 prévoit que le principe est que l'auteur percevra une participation proportionnelle aux recettes provenant de la vente ou de l'exploitation. Et par exception, dans des cas très précisément énumérés (en gros, lorsqu'il est impossible de calculer une rémunération proportionnelle), il peut être prévu une rémunération de l'artiste au forfait.
(***) Le lecteur malicieux aura compris qu'il s'agit des droits voisins du droit d'auteur, qui confère des droits moraux et patrimoniaux à ceux qui utilisent d'une certaine manière des oeuvres. Par exemple, un artiste-interprète, en chantant d'une manière particulière une chanson préexistante, créera en quelque sorte une nouvelle oeuvre, sur laquelle il aura des droits moraux et patrimoniaux.
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