Quand on y pense quand même, la drogue, c'est super. D'abord, d'un point de vue médical : ça vous débouche les narines, ça vous détartre les gencives et ça vous récure les neurones. Ensuite, d'un point de vue technique : La drogue, ça vous permet de connaître les rudiments du métier d'infirmière et, de nos jours, savoir faire un garrot ou se piquer entre les doigts de pied, ça peut toujours servir. Enfin, ne négligeons pas l'aspect géopolitique : ce sont des dizaines de pays qui vivent grâce à ce commerce qui repose, avant tout, sur d'honnêtes plantations.
Bref, il faut être vraiment un esprit chagrin pour s'en plaindre.
Par contre, il existe un vrai fléau qui menace nos enfants et les piliers même de notre société. C'est un mal endémique, très pernicieux, qui commence par une innocente passion et se termine par une zombification de l'âme. Ce sont, bien sûr, vous l'aurez compris, les jeux vidéo et heureusement, heureusement, nos parlementaires sont des hommes éclairés qui ne se laissent pas avoir et qui ont su déceler cet ignoble danger en proposant, le 13 juillet dernier, un texte de loi.
Car oui, oui, trois fois oui, et je cite le texte que vous trouverez ici, "les jeux vidéo ne sont pas sans danger. Et il serait dommage que la passion devienne une addiction…". Vous noterez les trois petits points qui confèrent une dimension poignante à cette phrase dont la beauté se dispute à la simplicité.
"En effet", nous dit le texte : "les enfants passent de nombreuses heures au quotidien devant les jeux vidéo. Certains plus de 2 heures !" Notez le point d'exclamation, qui souligne à la fois le constat éclairé et la juste indignation devant tant de danger. Plus de 2 heures, vous vous rendez compte ! C'est que, le texte est formel : "On considère qu’une personne est « accro » aux jeux lorsqu’elle passe plus de 2 heures par jour sur l’ordinateur ou sur console.". Arrêtons-nous un instant car, je vous connais, vous êtes des esprits chagrins. Alors, je vous prie, amis lecteurs, de ne pas être tentés de considérer que le "on" est celui de "con"; c'est en fait celui de "raison". Comme dans "on ne sait pas de qui il parle, mais il a raison".
Et voilà le constat : "D’où l’émergence de troubles du comportement et de pathologies sévères chez les adeptes des consoles de jeux. L’utilisation abusive des jeux vidéo peut présenter un réel danger. Le jeu peut rapidement dégénérer en dépendance".Notez ici, l'usage du terme "rapidement" qui n'est pas assez explicite. J'aurais plutôt mis, "le jeu peut dégénérer instantanément en dépendance", cela aurait été plus vrai.
"Les conséquences sont alors très graves : fatigue visuelle, asociabilité, agressivité, nervosité, vertiges, troubles de la conscience et de l’orientation, voire crises d’épilepsie et nausées, repli sur soi, échec scolaire, perte de la notion du temps, déshydratation et sous-alimentation. Les jeux vidéo excitent l’imaginaire des enfants qui se laissent envahir et n’arrivent plus à s’en passer. L’entourage ne compte plus durant le jeu et l’enfant risque de devenir « accro » à ce monde imaginaire en laissant toute autre activité de côté. Cet isolement peut même devenir un rituel qui entre profondément dans les habitudes de l’enfant."
Notez le détail foisonnant des troubles que peut subir un enfant, à tout moment, lorsqu'il joue 2 heures par jour. Mais nos parlementaires ont trop de retenue ; il manque : la perte de la notion du bien et du mal, un goût prononcé pour la violence et le sang, un penchant pour le school shooting de masse et le suicide collectif. Et le texte de conclure: "Lorsque les jeux vidéo présentent un risque en matière de santé publique en raison de leur caractère potentiellement addictif, il est temps de penser à vos enfants et aux générations futures".
Ah ! L'argument des générations futures. Quand la civilisation, telle que nous la connaissons, aura sombré dans le chaos, nos enfants nous demanderons : et toi, que faisais-tu pour lutter contre les jeux vidéo ? Et c'est les larmes aux yeux que nous répondrons, "rien mon fils, rien, je ne faisais rien, mais ne m'en veux pas, fruit de mes entrailles, je n'avais qu'une Wii !"
Enfin, heureusement que nous détruisons à grande vitesse la planète, cela nous évitera de trop faire souffrir les générations futures.
Alors le projet de loi prévoit 4 articles que je vous copie, pour que vous n'en perdiez pas une miette :
Article 1er
Dans un délai de trois mois suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, un arrêté des ministres chargés de l’Éducation nationale et de la Santé fixe un programme d’éducation à la santé et de prévention des comportements à risques, en particulier l’usage abusif des jeux vidéo, dans les horaires et programmes de l’école primaire.
Article 2
Dans un délai d’un an suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, le ministre chargé de la santé présente dans un rapport déposé sur le bureau de l’Assemblée Nationale, un plan d’action permettant notamment de former et de sensibiliser les professionnels de l’addictologie aux problèmes d’utilisation excessive de jeux vidéo et favoriser leur intervention auprès des élèves et des familles dans le cadre d’actions de prévention.
Ce plan précise les actions de prévention, de diffusion d’informations et de conseils de vigilance diffusés dans les médias qui sont mises en œuvre.
Article 3
Dans un délai d’un an suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, le ministre chargé de la santé élabore une charte éthique qui amène l’industrie des jeux vidéo à s’orienter vers une politique du jeu responsable, en favorisant notamment des sessions de jeu plus courtes et marquées de pauses obligatoires de trente minutes, voire plus pour des jeux de longue durée.
Article 4
Les charges qui pourraient résulter pour l’État de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Attendons donc de voir ce que cette fameuse charte éthique (notez l'usage de ce mot, rassurant) prévoira pour amener les éditeurs à organiser des coupures obligatoires d'au moins trente minutes.
Qui a dit des coupures publicitaires ? Non, je vous en prie, ne soyez pas mauvaises langues, ce n'est pas le genre de notre parlement !
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