Hambourg n'est pas la grosse bourgade provinciale tranquille que j'imaginais. Outre son passé de ville fondatrice de la ligue hanséatique, son statut de premier port d'Allemagne et de seconde ville du pays après Berlin, c'est une métropole cosmopolite qui regroupe, dit-on, une centaine de consulats internationaux. Et Hambourg possède l'étrange particularité d'avoir abrité trois des kamikazes du 11 septembre 2001.
C'est aussi le décor du dernier roman de David John Moore Cornwell, alias John Le Carré, décor dans lequel il fait errer plusieurs personnages : un jeune Tchétchène, immigré clandestin rendu fou par les tortures et dépositaire d'un secret dont il ne soupçonne pas l'importance; une avocate spécialisée, militante des droits des immigrés; un banquier vieillissant gérant la banque d'affaire familiale sans savoir ce que contiennent effectivement tous ses coffres; et bien sûr différents espions pataugeant entre rivalités anciennes, doctrines dépassées et traumatisme post-2001, sans compter la mafia russe et les collecteurs de fonds islamistes.
John Le Carré installe ainsi la forme de bourbier dont il a le secret, un marécage à visibilité réduite d'où personne ne peut ressortir propre. "Un homme très recherché" n'a ni le souffle, ni les personnages attachants de "La constance du jardinier". Mais la description du milieu du renseignement en Allemagne et de la confusion dans laquelle se sont trouvés les services secrets occidentaux après les attentats du 11 septembre (et en particulier l'influence catastrophique des services étasuniens) est passionnante. Effrayante aussi, parce que l'auteur, qui a fait partie du MI5 comme du MI6, et fut un moment en poste au consulat britannique de Hambourg, sait visiblement de quoi il parle.
"Un homme très recherché", un roman de John Le Carré, édité par Le Seuil, environ 22 euros.
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