On a tendance à négliger l'aspect psychologique du jeu de tape, au pire parle-t-on de domination psychologique quand on met une grosse raclée à quelqu'un ! Mais il ne faut pas négliger l'aspect psychologique et la stratégie dans le match en lui même. Pour bien vous aider à comprendre tout cela, voici un petit tutoriel qui vous fera découvrir les aspects les plus importants de ces merveilleux jeux de bourre pif.
Il existe quatre phases distinctes dans un jeu de combat : le zoning, le pressing, le combo, et la garde. Chacune de ces phases est la résultantes d'une autre et possède des points précis à aborder.
Le zoning
Le zoning est la phase de départ d'un match : les deux adversaires sont espacés l'un de l'autre, ne se touchent pas, s'observent (et quelques fois s'apprécient... pardon) pour mieux comprendre leurs faiblesses mutuelles. La phase de zoning est souvent négligée par les joueurs débutants qui foncent dans le tas sans faire attention. Le zoning consiste, via les forces de son personnage dans cette phase, à limiter les mouvements de son adversaire dans l'espace pour l'empêcher de faire ce qu'il veut et le faire faire ce que l'on veut. Plus votre personnage a de la portée, plus il sera fort en zoning car son adversaire devra alors se défendre ou éviter certaines phases d'approches alors qu'il n'est pas au corps à corps.
Il faut donc imaginer un personnage de cette manière : il occupe de l'espace sur l'écran, et plus il en occupe plus il sera fort en zoning. Cela nous amène à la notion dite « De distance vitale ». Chaque personnage possède une distance vitale, ou distance de sécurité, qui est la moyenne de la portée de ses coups hors projectiles, et plus une distance vitale est grande, plus le personnage fort en zoning.
La distance vitale porte ce nom car c'est quand on rentre dedans qu'un personnage ne peut plus zoner et qu'on peut passer à la phase de pressing. Or les personnages zonant très bien ont souvent une faible attaque et une faible défense au corps à corps, et ils doivent donc empêcher à tout prix leur adversaire de pénétrer leur distance vitale tout en étant très précautionneux quand il pénètrent celle de leur adversaire.
Et vice-versa, un personnage zonant peu et étant fort au corps à corps fera tout pour entrer dans la zone vitale, aura plus de facilités dedans, et sera content de voir un adversaire peu fort au corps à corps y venir car il possède plus de capacités pour ce genre de situation. Un Zangief sera heureux de vous voir se coller à lui, alors qu'un Dahlsim n'aimera pas avoir son adversaire trop proche car ses coups ne touchent que si son adversaire est loin.
Le principe est au final très simple : plus on occupe d'espace, moins l'adversaire peut bouger pour nous attaquer ou se défendre de notre attaque. Par exemple un Hadoken de Ryu restreint l'espace au sol pour les personnages n'ayant pas de projectiles mais ne les empêche pas de bouger dans les airs, et son Shoryuken restreint l'espace au dessus de sa tête, empêchant une attaque par le haut au corps à corps, mais pas à distance.
Le pressing
Le pressing est la phase qui suit le zoning : parce que un coup bien placé qui touche l'adversaire (dans sa garde ou non) permet alors de l'approcher sans trop de craintes, l'attaquant pénètre la distance vitale de son adversaire.
A partir de ce moment l'attaquant passe en phase de pressing, alors que son adversaire passe en phase de garde. Le pressing dans tout les jeux de baston est régi par trois variantes, un pierre/feuille/ciseau basique composé de coup hauts, de coups bas, et de la choppe. Les coups hauts sont généralement portés en sautant et forcent l'adversaire à se protéger en étant debout, les coups bas sont généralement portés au sol et forcent l'adversaire à se protéger en étant accroupi, et la choppe annule ce principe de haut/bas en étant une attaque qui ne dépend d'aucune de ces deux positions, et qui force l'adversaire soit à déchopper, soit à sauter pour l'éviter, en contrepartie elle est plus difficile à placer. Dans la plupart des jeux de combat, les personnages possèdent au sol des coups bas et un ou deux coups haut, généralement voyants et/ou lents que l'adversaire peut voir venir, et qu'on appelle des casse garde.
A cela on peut rajouter le principe du cross-up. Le cross-up est le fait d'inverser la garder de son adversaire non pas en jouant sur le haut ou le bas, mais sur le coté. Il suffit par exemple de sauter sur un adversaire se relevant pour soit tomber face à lui, soit tomber dans son dos. Si on tombe dans son dos on dit qu'on a inversé sa garde, car en appuyant en arrière pour se protéger, il a en fait ouvert sa garde à son adversaire qui lui a inversé les commandes. C'est un des jeux favoris de Vega qui avec sa griffe tombe du ciel pour frapper soit d'un coté soit de l'autre, laissant peu de chances à son adversaire de trouver où va porter le coup.
Ce principe de cross-up peut être ajouté au principe du pierre/feuille/ciseau pour donner des pressings dévastateurs : les coups hauts/bas ou la choppe sont alors faisables devant ou dans le dos de l'adversaire qui doit gérer deux fois plus de variantes possibles.
Pour garder ce pressing l'adversaire doit alors jouer le une chance sur deux dès le début : garder normalement ou inverser sa garde tout en restant debout, puis garder en bas ou en haut tout en évitant une choppe potentielle.
Il existe énormément de pressings différents selon les personnages, cette forme de pressing étant surtout pour personnages un peu basiques comme Ryu ou Ken qui ont un bon équilibre entre les coups hauts, bas, et leur choppe. D'autres personnages sont plus forts sur le coups hauts mais pas les coups bas (par exemple Vega) et joueront alors énormément avec le cross-up, et d'autres ne sont forts que pour la choppe (Zangief) et feront alors tout pour que l'adversaire se défende via une pression psychologique intense, que ce soit en haut ou en bas pour pouvoir à un moment donné leur mettre une choppe spéciale qui fait de gros dégâts.
Pour finir, les choppes dans les différents jeux de combat s'effectuent différemment et mènent parfois à certains abus via une technique appelée l'option select.
Si le jeu ne possède pas de déchoppe (bien que la plupart des jeux récents en possèdent une) et que la choppe s'effectue en appuyant sur un seul bouton + une direction, alors on peut utiliser l'option select. L'option select est le fait de chopper en appuyant sur le bouton de choppe et un autre bouton d'attaque de manière à ce que si la choppe ne passe pas, un coup donné par le bouton d'attaque sorte, permettant de continuer le pressing. Cette technique a été très présente dans beaucoup de jeux pendant des années mais est désormais peu efficace : la plupart des jeux demandent désormais deux boutons plus une direction pour effectuer une choppe, la déchoppe est présente, et quand malgré tout la choppe s'effectue avec un seul bouton, les concepteurs bloquent l'option select au niveau du code pour qu'il n'y ait pas d'abus possibles.
Le combo
Le combo est la phase la plus connue des jeux de baston tant faire monter le compteur en jette auprès de son adversaire. Cette phase est vue comme la plus importante car c'est celle qui porte les dégâts et donc donne la sensation d'amener à la victoire, mais n'oublions pas qu'elle ne peut arriver sans un pressing et un zoning efficaces !
Il y a peu à dire sur les combos : chaque personnage possède les siens, certains en ont peu, d'autres en ont plein. Il existe cependant une subtilité intéressante en fonction du personnage qu'il ne faut pas négliger : comment finir son combo ?
Cette question idiote est pourtant primordiale car après le combo, on repasse soit en phase de zoning ou en phase de pressing, et selon la force du personnage joué dans l'une et l'autre de ces deux phases, il ne faut pas se tromper. Zangief par exemple devra obligatoirement terminer ses combos par une mise en sol de son adversaire tout en le gardant le plus proche possible de lui car il ne sait pas zoner, alors que Dahlsim fera son possible pour que son combo finisse en éloignant son adversaire. Ryu étant un personnage polyvalent, il préférera zoner si son adversaire est plus fort que lui au corps à corps, ou presser si son adversaire est plus faible que lui dans cette position.
Il ne faut donc pas négliger la fin de ses combos et les finir, quitte à faire moins de dégâts, dans une posture qui nous est avantageuse. Si Street Fighter ne permet pas de reprendre le contrôle de son adversaire dans les airs après un combo et permet donc une mise au sol plus facile, d'autres jeux sont moins laxistes et demandent une réelle réflexion sur l'exécution de ses combos.
La garde
Ah la garde... Des quatre phases, elle est souvent la plus sous-estimée et elle est pourtant celle qui peut faire gagner beaucoup de matchs. La garde demande d'abord une bonne connaissance du jeu et de ses mécaniques pour savoir ce dont l'adversaire qui attaque est capable.
Comme pour le pressing il existe trois gardes différentes : la garde haut s'effectue en restant debout et sert majoritairement contre des coups sautés. Elle sert aussi contre les casse garde au sol qui ont vite fait de punir une garde basse trop prononcée.
La garde middle est la garde qui ne dépend pas du haut ou du bas car elle garde les coups qui n'ont pas ces propriétés, ils sont des coups qui tapent dans la garde mais ne peuvent pas la casser à moins que l'adversaire ne garde plus.
Enfin la garde basse est la plus utilisée car la majorité des coups en pressing sont des coups bas. Généralement les coups bas sont des coups rapides.
Pour éviter les choppes il y a trois solutions : soit faire un petit bond en arrière (backdash) si le jeu le permet, soit déchopper en appuyant sur la commande de choppe (mais cela nécessite de l'avoir vue venir), soit sauter tout simplement. Comme il a été dit plus haut il est difficile de s'échapper d'une choppe si celle-ci est effectuée dans un jeu permettant l'option select, le coup porté en même temps que la choppe cassant alors le backdash ou le saut si celui-ci n'est pas assez rapide.
Une des techniques les plus utiles pour garder se nomme la Fuzzy Gard. Il s'agit d'une manipulation assez simple se basant sur la vitesse des coups plus que sur leur propriété : les coups bas sont généralement très rapides alors que les coups haut sont souvent lents. En se basant sur la vitesse des coups portés par l'adversaire dans la garde, on tente via réflexes d'adapter sa garde en fonction de la vitesse de chaque coup porté en supposant sa propriété. La contrepartie de cette technique est qu'elle nécessite beaucoup d'attention et que souvent on se focalise trop sur la garde, en oubliant que l'adversaire peut... nous chopper !
Quelques petits conseils
Pour finir voilà quelques conseils pour les débutants et quelques cas souvent vus et comment les éviter.
Le Shoryuken a la relevée : technique souvent appréciée des nouveaux joueurs, lancer un dragon punch à la relevée peut sembler être la technique ultime pour éviter d'avoir à utiliser la garde, et le pire c'est que souvent ça passe. Si vous vous trouvez contre un joueur faisant tout le temps cette technique, approchez le quand il va se relever et faite un petit coup dans le vide. Votre adversaire croira alors que vous allez l'attaquer via des coups peu forts, et lancera son Dragon Punch. Gardez alors pour que le dragon punch ne vous touche que dans la garde, et quand le personnage redescend, punissez le avec un combo. S'il a l'idiotie de recommencer après la punition, refaites cette technique jusqu'à ce qu'il comprenne que ça ne sert à rien et qu'il doit se défendre en se relevant.
La punition : très importante, la punition est le fait de faire payer une erreur de l'adversaire par de gros dégats. Au delà du zoning et pressing parfait, les adversaires font souvent des erreurs. Si cela trop apparent il faut alors le punir : un Zangief fait sa choppe spéciale de manière trop évidente ou trop loin ? Lui envoyer une furie le punira de son inconscience ! Un Vega sauter de partout en l'air sans trop faire attention ? Un dragon punch des familles lui fera comprendre qu'il n'a pas sa place. La punition au delà des dégâts, peut être une énorme pression psychologique pour votre adversaire qui verra ses moyens d'attaquer se réduire comme peau de chagrin.
Le hit confirm en counter : utile pour des personnages possédant des coups qui étourdissent beaucoup, le hit confirm est le fait de lancer une attaque à partir d'un unique coup qui a étourdit l'adversaire. Le hit confirm est le plus souvent utilisé en counter hit, quand vous et l'adversaire frappez au même moment mais que vous avez la priorité. Exemple dans Street Fighter 3, Chun-li pouvait, a partir d'un simple gros coup de pied, faire passer sa furie en combo et ainsi faire de gros dégâts.
Évidemment le hit confirm demande beaucoup de réflexes car il ne faut lancer la suite de l'attaque sur si le premier coup est passé.
Le mind game : ou jeu de l'esprit en bon français, est le fait de jouer sur la psychologie de son adversaire. Un exemple très simple peut être un pressing dont le dernier coup tape en haut. Ce pressing passe une première fois, l'adversaire l'a alors mémorisé et sait que vous pouvez lui porter cette attaquer. Il faut alors refaire le même pressing mais finir par un coup bas pour que l'adversaire, qui était habitué au coup haut, se prenne le coup. Cela est également important concernant le zoning : si un personnage en empêche un autre de venir par le sol alors il tentera de sauter, et c'est à ce moment là qu'il faut donner un grand coup vers les airs pour l'empêcher d'avancer.
La psychologie : au delà de l'aspect technique existe l'aspect psychologique qui est un des plus importants. Si un des deux joueurs prend le dessus psychologiquement alors il a presque gagné. Pour cela il peut zoner et empêcher l'adversaire de bouger, adversaire qui sera alors frustré de ne pouvoir avancer, il peut enchainer les pressings compliqués que l'adversaire n'arrivera pas à éviter, faire de très gros combos qui retirent beaucoup de vie, ce qui a tendance à faire paniquer le joueur adverse. De même que si un joueur à une garde parfaite où aucun pressing ne passe, alors l'adversaire paniquera en se sentant inférieur. Il ne faut vraiment pas négliger cet aspect dans un jeu de combat car il peut être déterminant : un joueur oppressé foncera sans zoner, ne sera pas innovant dans ses pressings, ratera ses combos, ne se protègera pas bien à cause de la crispation due au stress, et tout ça peut faire gagner un match.
Jouer au stick : cela peut sembler rébarbatif, mais jouer au stick apporte un plus non négligeable que ce soit du point de vue de la maniabilité ou du confort. Certes il faut apprendre à jouer avec mais cela n'a rien de différent d'un joueur PC apprenant à jouer avec une manette et vice-versa. Au delà du simple Street Fighter qui possède des manipulations assez communes, beaucoup des jeux ne peuvent pas se jouer efficacement a la manette. De plus les bénéfices de l'apprentissage au stick sont énormes car chaque jeu de baston découvert est alors joué tel qu'il est jouable en arcade !
Il existe pour Xbox, PS3, PS2 et Wii des sticks arcades de qualité pour un prix se situant entre 60 euros et 120 euros, les sticks en dessous de ces prix étant de la camelote qui vous dégoutera plus du jeu qu'autre chose, investissez en neuf ou occasion et revendez le si vous n'en avez plus besoin. Ces sticks sont chers mais bien plus solides qu'une manette et fonctionneront toute votre vie : aujourd'hui encore les fans de King of Fighters jouent avec leur stick Neo Geo acheté au début des années 90 !
Dernier conseil et non des moindres : jouer et surtout jouer contre beaucoup de gens différents. Cela peut paraître évident mais jouer contre les même personnes a tendance à freiner l'apprentissage car malgré toute la bonne volonté possible, un joueur finit par se répéter, possède une certaine psychologie. Il est dangereux de jouer contre toujours le même joueur car on se fait alors une idée d'un type de joueur, d'un seul style de jeu.