Voilà un moment que je cherchais une occasion de vous parler d'Arturo Pérez-Reverte, ancien journaliste espagnol devenu auteur de best-sellers, sans trouver d'alibi valable : sa série consacrée aux aventures du Capitaine Alatriste se déroule en effet au 17e siècle, ce qui cadre difficilement avec le thème de la chronique "Guerre et Pègre". Et puis j'ai découvert, planqué derrière les rideaux sales de mon ignorance crasse, que ce bougre d'hidalgo avait aussi écrit de soit-disant "thrillers". Qu'à cela ne tienne, il ne me restait plus qu'à en lire un, à en causer ici et à en profiter pour dire deux mots de ses autres écrits. Exécution !
Première étape : lecture de l'édition de poche du "Tableau du maître Flamand". Ce roman d'Arturo Pérez-Reverte date de 1990, mais qu'importe, il a eu un tel succès qu'il est réédité et facile à trouver. Facile à trouver, mais pas facile à finir… c'est là qu'intervient l'étape deux.
Deuxième étape : pousser un soupir de soulagement une fois tournée la dernière page, et rassembler ses pensées. Ainsi donc Julia, jeune restauratrice en œuvre d'art, travaille sur un tableau hollandais qui doit être nettoyé avant sa prochaine vente aux enchères. Le tableau représente deux joueurs d'échecs observés par une jeune femme, et notre héroïne découvre bientôt que le peintre a camouflé à l'époque sous une couche de couleur supplémentaire une mystérieuse inscription : "Qui a pris le cavalier ?". Celle-ci se rapportant manifestement à l'assassinat d'un des joueurs représentés, Julia mène l'enquête pour résoudre ce crime vieux de plusieurs siècles en faisant appel à un spécialiste du jeu d'échecs. Tout se corse lorsque de nouveaux crimes ont lieu, apparemment liés au tableau et à l'échiquier.
Il y a les personnages un peu bancals, l'intrigue assez bas de gamme, le super mystère de l'échiquier qui fait un peu pitié dès lors qu'on sait au moins déplacer les pièces, le dénouement final qui mérite à peine plus qu'un bâillement poli, bref déjà plein de bonnes raisons de lire autre chose. Mais le principal, c'est qu'on s'ennuie plus qu'à une partie de curling en plein brouillard : tout est mou, et en particulier le style.
Troisième étape : enchaîner habilement sur les aventures du Capitaine Alatriste. En qualité d'immense fan d'Alexandre Dumas, lorsque mon libraire m'alerte sur une série de romans d'aventures qui relève du même esprit, je déverse immédiatement un torrent de salive, avant de m'excuser pour la pile de BHL-Houellebecq ainsi gâchée. Pensez donc : des hidalgos ! des duels à l'épée ! des intrigues de cour ! de la pasión ! de la Sainte Inquisition !
Hélas, ma deceptión, pour ne pas dire ma consternatión, fut grande et je me suis contenté des deux premiers volumes ("Le capitaine Alatriste" et "Les bûchers de Bocanegra", tous deux en livres de poche, écrits gros, interligne double). Non seulement il ne se passe pas grand chose, mais en plus on ne retrouve ni le souffle ni la jubilation qui font des romans de Dumas de purs bonheurs de lecteurs. Alors, je vous en conjure, ne vous fiez pas aux films ou aux séries que vous auriez pu voir : si vous n'avez jamais lu "Les trois Mousquetaires", vous avez une chance incroyable de pouvoir découvrir ce chef-d'œuvre pour la première fois, alors foncez !
Conclusion : Et dire que j'en suis réduit à acheter un mauvais thriller paru il y dix-huit ans dans l'unique but de vous parler in fine d'Alexandre Dumas…
"Le tableau du maître flamand", un roman policier pas bien d'Arturo Perez-Reverte, en Livre de Poche, 6 euros environ.
"Les trois mousquetaires", un grand roman qu'il est formidable d'Alexandre Dumas, en Livre de poche aussi, 6 euros environ aussi.
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