Monsieur le député,
C’est aujourd’hui à propos du projet de loi DADVSI que je me permets de vous écrire. Je m’appelle *****, et habite *******, c’est pourquoi je m’adresse à vous. J’aimerais vous faire part de mes inquiétudes à propos de DADVSI, qui selon moi est une loi qui n’a pas sa place dans notre pays, et ne doit pas être votée ce 30 juin.
En effet, même si la lutte contre le piratage est bien entendu normale, il convient de ne pas confondre piratage et liberté. Ainsi, il s’avère que ce texte de loi interdit toute copie privée. Cela signifie donc que si j’achète un disque, il m’est impossible de le copier, pour en avoir un exemplaire dans ma voiture et chez moi en même temps, ce qui semblerait pourtant légitime. De même, je n’ai pas le droit, selon le texte de loi, de transférer la musique de ce CD à mon ordinateur. Je n’ai alors pas la possibilité de créer des listes de lecture comme les ordinateurs le permettent, en mélangeant plusieurs CD. Enfin, plus grave, je ne peux alors pas transférer ces chansons, que j’ai pourtant achetées, vers un lecteur MP3 de type iPod, alors que c’est là sa fonction primaire. L’acheteur honnête serait alors pénalisé ? De plus, il est évident qu’économiquement, les conséquences sur les ventes d’appareils de type MP3 pourraient être désastreuses. D’autant plus que la solution de l’achat de musique par Internet empêche de lire cette musique sur une chaîne hi-fi de salon comme nous en utilisons tous, puisque, DADVSI interdisant la copie privée, interdit aussi de graver sur CD des musiques achetées en toute légalité.
Ceci est fort dommageable, et s’avère tout aussi vrai pour les DVD. Acheter un DVD pour le transférer vers mon ordinateur ferait alors de moi un criminel ?
Mais DADVSI comporte de nombreux autres défauts majeurs. Elle interdit l’utilisation de logiciels de partage en « peer-to-peer », logiciels qui peuvent être utilisés de façon tout à fait légale en permettant un téléchargement plus rapide de contenu multimedia en tous genres, notamment promotionnels (démonstrations, vidéos de jeux vidéo peuvent être ainsi plus largement diffusés, par exemple). Cette loi empêche aussi l’utilisation de logiciels libres de lecture vidéo, à l’image du logiciel VLC, reconnu unanimement comme un lecteur multimedia de grande qualité. N’oublions pas aussi qu’énormément de personnes qui utilisent ces réseaux « P2P » de façon illégale achètent aussi des CD, DVD, et vont au cinéma. Il est fréquent qu’ils téléchargent des produits pour lesquels ils n’auraient pas payé, il n’y donc pas de manque à gagner pour une industrie dont la santé est loin d’être si faible qu’on veut bien nous le faire croire. Souvent, le téléchargement peut aussi permettre la découverte de nouveaux genres musicaux, de nouveaux artistes, et l’on achète leurs produits lorsque l’on estime qu’ils en valent la peine. Il m’est souvent arrivé de télécharger de la musique que j’ai achetée ultérieurement. Par ailleurs il ne me semble pas que les bibliothèques aient jamais atteint aux droits d’auteurs perçus sur les ventes de livres.
Arrive ensuite le point le plus noir de DADVSI. La décision d’installer un logiciel sur les ordinateurs des gens, qui surveillerait leurs faits et gestes, est simplement révoltante. Ainsi, notre liberté est mise au conditionnel ? Les internautes français sont maintenant tous considérés comme des criminels en puissance, et ceci constitue un liberticide indigne d’une démocratie. A ce propos, il est à souligner que seul le régime totalitaire Chinois applique ce genre de techniques de surveillance… Aimeriez-vous, monsieur le Député, être surveillé en permanence ? Aimeriez-vous que l’on installe des caméras chez vous pour être surveillé ? Enfin, aimeriez-vous vivre dans un ersatz du 1984 de George Orwell ? Si nous n’y sommes pas encore, nous risquons bien de franchir le pas le 30 juin si la loi DADVSI est approuvée par le Parlement. On ne peut atteindre de façon si flagrante à la liberté des citoyens, sous le prétexte fallacieux de vouloir protéger les droits d’auteur. Et surtout pas sous la pression des majors du disque.
C’est d’ailleurs un autre problème majeur de cette loi : il semble qu’elle soit dictée mot pour mot par les lobbies de la production musicale, comme en atteste la présence de représentants de FNAC, de Virgin et de lobbyistes de la SACEM dans des espaces de l'Assemblée normalement réservés au parlementaires, en décembre dernier. De plus, jeudi dernier, suite à de nombreux amendements, une seconde lecture aurait dû être organisée au regard de l'écart entre la version de l'Assemblée et celle du Sénat, ce à quoi le ministre de la Culture s’était engagé à sept reprises en hémicycle. Il s’est malheureusement parjuré sous la pression. Citons enfin l’intervention du Secrétaire d'État au commerce américain pour que soit retiré en mai au
Sénat les seules dispositions favorables au consommateur (concernant l’interopérabilité), dispositions pourtant adoptées à l'unanimité par les députés en mars dernier.
Ce dernier paragraphe est constitué presque exclusivement de redites de la dernière lettre d’informations de l’organisation eucd.info, qui avait fait circuler depuis la fin de l’année 2005 une pétition par Internet, pétition qui a recueilli 167 000 signatures de particuliers. Matignon a néanmoins refusé de la recevoir, les responsables de l’association ayant été arrêtés par la police afin d’éviter que les journalistes ne parlent de DADVSI. Mais l’auraient-ils fait ? En effet, l’amendement TF1 autorise les chaînes de télévision à utiliser librement la musique de leurs choix sans payer de droits d’auteur. N’est-ce pas là en contradiction avec l’esprit de cette loi ?
C’est ici que je conclurai ma demande. Je vous remercie de m’avoir lu, et j’espère que ma lettre aura un impact sur votre choix de demain à l’Assemblée. La plus belle réponse que vous puissiez m’offrir, ainsi qu’aux internautes Français, serait un refus de l’application d’une telle loi. N’hésitez pas à consulter les liens suivants, qui en apprennent plus sur mon inquiétude, sur celle des Français, qui ne veulent pas vivre dans un Big Brother, et garder la liberté qui orne notre devise nationale.
« Que fait DADVSI ? »
http://eucd.info/index.php?2006/06/2...fait-le-dadvsi
« L'encodage des oeuvres numériques, un nouveau Big Brother ? »
par Michel Rocard et Bernard Carayon
http://www.bcarayon-ie.com/articles/230606Fig.html