Cette vision marchande dessine la ligne directrice des politiques de santé appliquées avec assiduité depuis l’introduction en 2004 de la tarification à l’activité (T2A) pour financer les hôpitaux publics (3). Il s’agit de mettre en concurrence ces derniers et les cliniques commerciales, sur un pseudo-marché administré. Le but de chaque établissement n’est plus de répondre à des besoins mais de gagner des parts de marché en augmentant l’activité financièrement rentable, tout en réduisant les coûts de production.
Pour assurer l’équilibre des comptes, il faut donc à la fois augmenter les séjours, réduire leur durée, fermer des lits (70 000 en dix ans) et contenir la masse salariale, en bloquant les salaires, en comprimant les effectifs et en imposant le travail à flux tendu. Cette conception idéologique, qui réduit l’hôpital public à une chaîne de production ou à une plate-forme d’aéroport, tire argument du développement des activités techniques standardisées programmées, comme la pose de pacemakers ou de stents vasculaires, la dialyse, la coloscopie ou la chirurgie ambulatoire, soit les activités privilégiées par les cliniques privées.
Las, elle ignore à la fois l’explosion des passages aux urgences, conséquence du développement des déserts médicaux dans les territoires ruraux et en ville, et le développement des maladies chroniques ; elle fait l’impasse sur le retour des épidémies infectieuses, malgré plusieurs alertes ces dernières années.