Dans cet environnement de relations ou tout le monde deteste l'ecole et avoir des bonnes notes est percu comme une offense, je me suis sabordé en ne foutant plus rien. Seule ma prof de francais a essayé de me sortir de ce cycle, sans succés.
Au milieu des 90's, et peut etre meme encore aujourd'hui, l'orientation scolaire c'est bullshit.Au lieu d'essayer de comprendre pourquoi, de m'aider a faire des choix, le conseil scolaire m'a reclassé.
1 nouvelle année de perdue, je me suis completement bloqué a tout effort: je n'aimais pas du tout le genie electronique, alors je continuais mes abus.
Le conseil scolaire, encore lui, et malgré l'intervention de mon ex prof de francais, qui n'etait meme plus dans le lycée, me considere comme inapte, et on me classe dans un des trous les plus sordide du lycée, un CAP d'automatisme, rempli de gars qui savaient a peine lire, se bagarraient ou arrivaient defoncés en classe.
2 ans de plus ont passé.Il y a eu quelques bonne rigolades, mais sans m'en rendre compte j'etais en complete depression, me detestant, detestant ce que je faisais et le monde entier pour me laisser pourrir dans ce repere de cassos. Inutile de dire que je n'ai jamais eu ce foutu diplome de voie de garage, seul quelques matieres comme l'anglais, le francais et l'histoire géo me motivaient.Mais le niveau exigé ne depassait pas celui de la 6eme.
L'environnement familial ne souhaitait qu'une chose, que je debarasse le plancher au plus vite.
Peu apres ce nouvel echec, j'ai commis un soir la plus grosse connerie de ma vie, voler une voiture avec ma bande d'abrutis, et la planter. Heureusement les dommages etaient leger.
Les mois qui ont suivi ont été tres durs. Il n'y a pas eu de poursuites, ca s'est arrangé a l 'amiable, en remboursant le proprio en travaillant a sa ferme.Mes super copains m'ont laissé tomber.
Aussi dur que ce fut, ca m'a mis du plomb dans la tete. J'ai coupé les ponts avec tous ces gens malsain, suis devenu un geek de PC et de console, a l'abri dans ma bulle de repentance.
Mais il fallait faire quelquechose... j'ai choisi un apprentissage en tournage/fraisage, dans les locaux d'un celebre constructeur d'avion.
Encore une fois, j'en avais rien a carrer. Mais il y avait un salaire d'apprenti, qui me permettait d'acheter des clopes, de l'essence pour ma caisse, et des jeux video. Là non plus c'etait pas reluisant la compagnie. L'essentiel de la classe etaient composée de branleurs, fouteurs de bordel, et meme un jeune néo nazi. Des années plus tard, j'apprendrais que l'un d'eux a ete mélé de loin a une tristement celebre et inimaginable affaire de meurtre, regulierement montrée dans les faites entrer l'accusé et consorts.
Mais ils etaient bon en atelier,et rapportaient les subventions de la region, alors on laissait faire.
4 ans plus tard, avec beaucoup de prise sur moi meme pour pas tout envoyer bouler, j'ai obtenu cap, et bac pro. On va pas se mentir, il m'a ete donné pour bonne conduite plutot que talents mecanique, meme encore aujourd'hui rien que de rentrer dans une usine fait remonter l'horreur que j'eprouve a en avoir un jour fait partie.
Ce qui m'a fait tenir, c'est mon imagination. J'ai appris pendant les longues periodes d'usine a m'isoler totalement de l'environnement pour completement plonger dans mes pensées, et ecrire un roman d'heroic fantasy, qui ressemblait beaucoup au witcher quand j'y repense, 8 ans avant d'entendre parler pour la 1ere fois de geralt.
Les gars croyaient que je prenais des notes
perdu, j'etais juste en train de fuir cet endroit horrible. J'avais toujours une feuille technique par dessus pour masquer mes pages d'evasion, veritable bouffée d'oxygene.
Ces diplomes maudits ont marqué ma vie professionelle au fer rouge. Je n'ai connu que des echecs. Presse bouton sur une machine 1 mois, tacheron d'usine 1 semaine, j'ai mis pres de 8 ans a me sortir de cet environnement . De longues periode de chomage, entrecoupée de depression que je noyais dans de l'alcool parfois, et de contrats precaire.
Mon salut est venu de par mon ex compagne. Ses parents tenaient une charcuterie. A leur retraite, la fille reprend le commerce, et je decide de travailler avec elle, d'apprendre le metier, en etant a la boutique comme sur les marchés locaux.
J'ai manqué de maturité au debut: j'ai commis quelques erreurs, ait perdu quelques clients, le temps de me faire la main. Heureusement, je me suis révélé a moi meme. Je me depensais sans compter pour satisfaire le client, etre le meilleur, proposer la meilleure came possible.
C'etait physiquement éprouvant. Mais je me donnais sans compter, ne prenant parfois meme pas de jour de repos en pleine saison.
Oui, j'adorais ca. Mais les mentalités ont changé en quelques années. La crise monetaire de 2008 a laissé des traces indelebiles. Les magasins discount sont devenu légion, la concurrence, l'augmentation exponentielle de tout, les charges du RSI....
.... et les clients aussi. Les plus fideles meurent de vieillesse, les moins jeunes ne font pas confiance a un plus jeune "c'etait mieux avec les anciens"
Je me depensais des heures, pour la compta, le nettoyage, l'entretien, la boutique, pour au final un salaire de 800€/mois.
Inutile de dire que le ménage en a souffert. De plus notre petit etait arrivé, souvent balloté chez les grands parents pour cause de boulot. J'etais meme pas là pour le voir faire ses premiers pas, occupé a satisfaire une enieme cliente casse couille qui se prenait pour une reine.
C'en etait trop, des problemes psychologiques et d'addiction sont apparu, non pas chez moi, mais dans l'autre partie parentale.
Un cauchemar.
Trop c'est trop: financierement, physiquement , moralement, j'etais au bout. Je laisse son affaire a madame, bizarrement soulagée de ne plus m'avoir comme salarié/ homme a tout faire (j'ai meme appris a reparer des groupes frigorifiques tout seul...)
Dans la logique des choses, là ou il y a du boulot, c'est dans les grandes surface. Alors je tente ma chance, avec mon experience comme seul diplome.
Et j'ai trouvé. Ce a quoi je ne m'attendais pas: un travail d'usine. Ceux qui ont bossé en GMS sauront de quoi je parle...A une celebre enseigne bleu et blanche, nous avions interdiction de parler au client, les hotesses sont la pour ca. Une deshumanisation totale du commerce, pour n'etre que de la viande rentable a chaque seconde passée, a la recherche du moindre profit avec des techniques parfois border line.
J'ai ensuite atterri, pour un bout de temps, dans un magasin bio. J'y ai retrouvé une partie de ce que j'avais perdu: plus de contact clientele, de la mise en valeur de beaux produits, et meme des amis plus que des collegues.
Mais... un terroriste du bio/local en responsable adjoint, en guerre ouverte avec la responsable, a fusillé ma carriere naissante au rayon FLEG. Manipulateur pervers narcissique, il a compris que pour avoir les bonnes graces du directeur et avoir la place du chef, il fallait que le rayon FLEG soit digne des plus grandes epiceries fine mondiales. Alors il me chargeait pour n'importe quel detail insignifiant. Allais jusqu'a refaire mes etals, et meme rajouter des trucs abimes /pourris pour montrer au tout puissant patron.
Plus loin, certaines personnes ont utilisé la meme technique pour avoir les faveurs, en me designant comme coupable quand il y avait une connerie. Ca marchait: j'encaissais sans rien dire.
Ecoeuré, j'ai demandé a partir des FLEG, et me suis retrouvé... a la caisse, et en mise en rayon. J'ai tellement encaissé que j'en ai attrapé a plusieurs reprise une tendinite.
Quand a la mise en rayon, j'ai un jour passé 6h un samedi calme a balader un chariot de boites de thon, et en remettre une quand une partait. L'estime de soi est au plus bas.
Un jour de vacance, un grave evenement perso m'a fait comprendre que je ne pouvais plus m'absenter aussi loin et longtemps de mon domicile, parce que je me tapais 120kms aller/retour pour aller m'humilier et gagner 1059€ net.
C'est en devenant ami avec un electricien qui venait s'occuper du magasin que j'ai compris: j'aime ce metier.
Il est vivant! on utilise ses mains pour creer quelque chose qui sera vraiment utile au client. Sa lumiere, sa prise, ca semble peu de chose pour beaucoup, mais c'est énorme de se dire que son travail manuel va avoir une vraie utilité a quelqu'un.
On bouge sans arret de chantier en chantier, aucun jour ne ressemble a l'autre, le salaire est motivant et ce secteur ne semble pas connaitre de crise d'emploi.
Je suis donc reparti de zero, avec des conditions dignes d'un film de pierre richard que j'ai evoqué dans le le topic de la loose.
Le covid, un 1er formateur decédé, le deuxieme qui s'est barré, l'absence totale d'infrastructure et materiel adapté, la fermeture du centre d'hebergement, et un divorce en cours.
Mais rien n'a entaché ma volonté de devenir electricien. Et j'y parviendrais, coute que coute, j'effacerais ces 20 ans de merde pour enfin m'epanouir.