Envoyé par
Nilsou
Bon je voulais éviter le double post, mais allez comme ça je serais débarrassé.
J'ai fini, enfin, Chihayafuru (S1+2+OAV), un animé très souvent recommandé un peu partout et très bien noté un peu partout dans les catégories Josei et Seinen, donc assez intriguant, et assez long. Alors c'est partiiiiiiiiii :
Ce fut un parcours du combattant. L'animé est assez complexe et j'ai à la fois pas mal de chose à lui reprocher et pas mal de raison de l'aimer. Et il est difficile, après plus de 52 épisodes, de faire la part des choses entre ce qui vient des qualités intrinsèques de l’animé et une part de complexe de Stockholm qui fait qu'a force j'ai fini par me faire à ses défauts.
Le Synopsis :
L'animé nous raconte l'histoire d'un groupe de gamin (puis de lycéens) : Chihaya (l'héroine), Taichi (le garçon no 1) et Arata (le garçon no 2) qui font se forger une amitié enfant autours d'un jeu typiquement japonais : le Karuta.
Le Karuta est une sorte de jeu de réflexe, d'audition et de mémoire dont le concept est finalement assez simple : deux joueurs se font face et ont à disposition chacun 25 cartes qu'ils peuvent placer devant eux comme ils veulent. Sur ces cartes sont écrits des poèmes. Le Karuta formant ainsi une anthologie de 100 poèmes qui ont été écris sur des centaines d'années.
Un lecteur lis une carte au hasard et les participants doivent foncer le plus rapidement possible vers cette carte sur leur plateau de jeu (ou celui de l'adversaire) pour la récupérer. Celui qui arrive à vider son plateau de jeu (on donne une carte à l'adversaire si on lui en prends une, donc même prendre une carte chez l'adversaire vide son plateau de jeu) alors on gagne.
C'est un jeu de mémoire évidemment, puisqu'il faut se souvenir ou sont les 50 poèmes en jeu sur le plateau, ce qui est sans doute très difficile, surtout sans l'aide d'image (une partie commence par 1/4 d'heure de mémorisation). Mais aussi un jeu d'audition, puisque la rapidité va se jouer à l'écoute des premiers sons du lecteurs pour deviner de quel poème ils en sont le début (ce qui fait que la plupart des coups se finisse bien avant que le premier couplet du poème soit lu, donc la dimension poétique du jeu est assez peu présente finalement). Et finalement c'est un jeu de rapidité puisqu'il faut atteindre la carte le premier. (on a le droit de toucher plusieurs cartes en même temps tant qu'il y a la bonne dedans donc c'est un jeu assez violent finalement, qui consiste à foncer vers la partie du plateau avec la bonne carte et tout envoyer valdinguer très vite).
Voila pour une très rapide idée du jeu dont il est question. Ajoutons qu'il s'agit d'un jeu relativement vieux au japon, qui était joué à la cours impériale etc... donc il y a une dimension culturelle certaine.
Parmi nos trois gamins. Arata (le garçon no 3 ) est un dieu du Karuta, il est le petit fils d'un grand maitre du Karuta et est prédestiné à devenir maitre un jour. Chihaya, l’héroïne, va être submergé par son talent et va tomber amoureuse du Karuta. (et peut-être un peu du gamin aussi, toute l’ambiguïté est là). Taichi se retrouve bon second car il est subjugué par Chihaya et fini par s’intéresser au Karuta par défaut puis s’intègre tout de même au groupe d'ami, considérant Arata à la fois comme un rival et comme une sorte de dieu.
Nos trois gamins vont grandir. Atteindre le lycée. Et voila, c'est seulement maintenant que l'animé débute vraiment ... Oui c'est un long synopsis
Arata, le dieu du Karuta est resté dans sa contrée natale tandis que Taichi et Chihaya sont dans le même lycée à Tokyo. Chihaya va alors décider de monter une association de Karuta et entrainer Taichi avec elle, le tout dans l'objectif de rencontrer un jour son dieu-amoureux-ami-on-sais-pas-trop (Arata) dans un match officiel. Son objectif est donc de devenir no 1 et de rejouer un jour avec son dieu, à son niveau. Alors que l'objectif de Taichi est juste de rester avec Chihaya.
PPfffiouuuuuuuuuu, et ça c'est juste un vague résumé de la situation à l'épisode 1, sur 52
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Donc l'animé tourne autour de trois pivots : le Karuta, le triangle "amoureux" Chihaya-Arata-Taichi, et l'association qu'a monté Chihaya au lycée qui permettra d'introduire pas mal de personnage secondaire.
Si vous avez lu jusqu'ici, quelque chose doit sans doute vous interpeller, c'est la place que prends le Karuta dans mes paragraphes précédent. Hé bien bravo ! Vous avez deviné quel est à la fois le plus grand point positif et le plus grand défaut de l'animé.
Cet animé n'est PAS un animé sur des amis jouant au Karuta, et n'est PAS un animé se centrant sur l'association de Chihaya, ni sur le triangle amoureux Chihaya-Arata-Taichi. Non non non, cet animé est un animé sur le Karuta et que sur le Karuta (compétitif en plus). A la marge c'est également un animé sur la progression de Chihaya pour devenir no1 du Karuta.
Tout comme dans mon synopsis qui se transforme un peu en livre de règle du Karuta sur le 2/3 du paragraphe, l'animé lui aussi se transforme un peu en livre de règle du Kurata au 2/3, mais sur 52 épisodes . Le soucis c'est qu'a la fin d'un manuel de 300 pages sur, disons, la pétanque, j'en saurais surement beaucoup plus sur la pétanque. Il y a donc un vrai apport à ce manuel "La Pétanque pour les nuls". Mais est-ce fun ? Gros joker sur le sujet ...
Cette orientation de l'animé induit immédiatement pas mal de mauvais points, en vrac :
- Les personnages n'ont pas vraiment d'interaction directe entre eux, que ce soit au niveau associatif ou au niveau triangle amoureux. Ils ne communique QUE via le Karuta. et uniquement par ce biais. Le problème c'est que sur 52 épisodes ça manque de ces petites scenes de la vie de tout les jours qui parsème les autres animés. Et ça c'est triste. Ça rends l'évolution des personnages les uns par rapports aux autres quasiment inexistantes. (en tout cas pour un animé de cette taille)
- Le Karuta est basé sur de la technique instinctive la majeure partie du temps. Prenons l'exemple du jonglage. On peut faire un discours infini sur comment apprendre à jongler, quels sont les meilleures trucs pour apprendre, le ressentit de la balle dans les mains au moment du lancer etc... mais la réalité c'est qu'une fois les quelques conseils de bases donnés, il faut juste faire les choses par essais et erreurs et laisser son corps apprendre. Une fois que son corps à appris, la chose semble naturelle et il n'y a aucun long discours à faire dessus.
Ce que j’essaie de dire, c'est que dans les techniques sportives, toute une gamme de ces techniques est au niveau personnel, entre sois-même et son corps, et sont difficilement accessible à la communication, difficile à mettre en mot ou à exprimer.
Le Karuta est pile dans ce soucis, et l'animé passe donc beaucoup de temps à tenter laborieusement de nous expliquer des choses qui tiennent pour le joueur de l'entrainement et de l'instinctif. Comme dans d'autre animé qui ont tenté le coups, le résultat c'est d'avoir pas mal de phrase creuse et artificielle un peu partout dans l'animé, du genre "alors c'est ainsi qu'il le perçoit" ou "elle arrive à entendre les cartes" ou "les cartes sont ses amis" ou "elle est reliée aux cartes" etc etc...
- L'animé ne souffle jamais jamais, on passe d'un match de compétition à un autre. Certains match peuvent même durer 8 épisodes ou plus ... La combinaison de ce point avec le premier plus haut est que tout se ressemble. Au point qu'une fois j'ai perdu le fil de l'animé et en recherchant l'épisode ou je m'étais arrêté je n'arrivais plus à le retrouver, tout les épisodes y ressemblaient ! A chaque fois c'est des matchs de Karuta et encore des matchs de Karuta.
- Les sentiments des persos, notamment les principaux, sont souvent résumés à une unique motivation : devenir le meilleur ou devenir meilleur. Le soucis c'est que si il s'agit de sentiments compréhensible en sport, il reste, un peu comme les techniques plus haut, que ce sont des sentiments difficiles à partager. Oui je comprends la volonté de devenir no1 dans une discipline. Mais j'ai aussi pleinement conscience que c'est un sentiment très égoïste et donc difficile à partager, et en plus chacun à ses propres raisons. Quand je regarde un sportif de haut niveau dans un sport je comprends qu'il puisse ressentir ce sentiment, mais de là à explorer les tréfonds de son âme pour en savoir le détail... peut-être pas non. Les motivations purement égoïste de ce type rendent la communication à leur propos assez difficile et si l'animé tente tant bien que mal d'édulcorer l'affaire et de rendre cela intéressant, ça n'en reste pas moins assez meh la plupart du temps... On ne peut s’empêcher de se dire "oui elle veut être meilleure au Karuta, et alors ?".
C'est un peu l'inverse d'un bon shonen par exemple, ou en general les auteurs trouve une motivation facile à partager pour le héros, un truc sur lequel il est facile de faire de l'empathie (sauver le monde, retrouver son popa, ce genre de chose).
- Tout ces points font ressembler l'animé à un mauvais Shonen. En gros l’héroïne et son assoc enchainent les matchs pour progresser en niveau (matérialisés par des lettres (A, B, C, D etc...)) et c'est tout. Le soucis c'est que ça ne respecte pas les rythmes d'un shonen. Il n'y a pas de temps morts ni de diversité (point no 1 et 3) et donc la montée en puissance est assez peu glorieuse. L'animé est plutôt dans une sorte de crispation infinie assez désagréable.
L'autre point qui découle de celui là c'est que l'animé emploie de fait pas mal de technique des shonen qui rendent les choses très transparente. Il est aisé de deviner qui va gagner ou perdre dans un match. Certains déroulement sont complétement prédictible. Tient par exemple, après 2 victoire du héros dans un shonen, voici que se profile un combat "optionnel" donc la défaite ne serait pas grave hormis pour sa fierté. Ben évidemment il va le perdre, parce que ça n'influence pas l'histoire et la progression du héros mais que ça permet de montrer qu'il est vulnérable et de le faire grandir. Une fois qu'on a compris ça il est aisé de prédire quand il va gagner et quand il va perdre si le shonen reste prédictible et bas de gamme. Ben ChihayaFuru c'est un peu ça à longueur de temps.
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Pour finir, disons que l'animé est également un assez mauvais Josei, les personnages ne sont pas très intéressant, ni très originaux. On se coltine le sempiternel trio amoureux fille - garçon - garçon. Avec l'un des garçon au dessus de la mêlée et distant et l'autre qui est amoureux de l’héroïne. L'amoureux principal qui est au coté de Chihaya est bien évidemment le plus beau garçon du lycée (évidemment), l’héroïne ne le voit bien évidemment pas, il est bien évidemment le rejeton d'une famille très riche.
Quant à l’héroïne c'est évidemment une fille guidée par ses sentiments, qui ne réfléchit pas trop, qui est à la fois passionnée et un peu nunuche. Ha et c'est évidemment la plus jolie fille du lycée aussi
Bref, on se coltine de belles caricatures d'un point de vue personnages. Heureusement que les persos secondaires sont là. Mais il ne faut pas oublier que l'animé est un animé compétitif même dans sa structure. Les persos secondaires, les plus mauvais au Karuta, sont peu présent à l'écran par rapport aux principaux, et c'est bien dommage, et leur taux de présence est totalement proportionnelle à leur talent au Karuta.
Finissons par ce qui d'habitude me rebute un peu mais ici c'est assez mineur pour n'en faire qu'une ligne : la morale de l'animé sur le fond est douteuse. L’héroïne affronte tout du long de nombreux adversaire qui parfois ne veulent pas devenir no1, et elle est sans pitié à ce propos. Tout du long on a l'impression que l'animé est une ode à la compétition inter-personnelle sous tout ses aspects, et il n'hésite pas à tendre des perche de temps à autres du genre "ça te permettra d'avoir une bourse pour rentrer dans une bonne université", donc ce n'est pas non plus totalement désintéressé et pour la beauté du geste.
Bref, c'est mineur, mais sur le fond ce n'est clairement pas ma came
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Pffffiouuuuu
Bon j'ai un peu fait le tour des mauvais points, et il n'y a pas tant de bon points que ça. Au bout de 52 épisodes on finit par se faire à ces mauvais points, à cet aspect ultra-compétitif, à ces bourdes de structure, au coté un peu répétitif du tout, très peu diversifié, à l'évolution quasi nulle des personnages. Et donc tout ça finit un peu par s'apaiser.
Il reste alors au fond de la marmite quelques bons points :
- La BO est sympathique.
- Les dessins sont classiques et pas très originaux mais propre.
- Le nombre de persos secondaires augmente au fur et à mesure et leur présence à l'écran un peu aussi.
- L’héroïne est très volontaire, c'est toujours ça de pris.
- Et surtout : le Karuta est un jeu très intéressant, même si il est surtout basé sur la vitesse et qu'il n'a rien de poétique finalement, ça reste intéressant de savoir de ce que c'est.
- Les personnages évoluent trèèèèèèèèèèès légèrement, mais un peu quand même.
- Les personnages et leurs répliques sont globalement bien écrit
On peut regretter deux ou trois trucs. Par exemple l'animé commence en montrant pas mal d'aspect du Karuta différent via les persos secondaires qui s’intègrent dans l'assoc et qui ont chacun une vision différente du truc. L'une vient et décide que l'association doit porter des Kimono comme dans l'ancien temps dans tout les matchs. C'est une contrainte et en plus c'est mignon et joli comme tout. Ou alors l'une des persos est très prises par l'aspect poétique du Karuta et conte la signification des cartes régulièrement.
Malheureusement ces points sont peu à peu réduit tout au long de l'animé et certains carrément abandonné lors de la S2 (plus de Kimono dans la S2 ) . Pour ne laisser plus que le Karuta compétitif. J'avoue n'avoir pas vraiment saisi pourquoi ...
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Alors on en arrive à la question : faut-il voir ChihayaFuru ? . Ben j'en sais rien ...
Chihayafuru est une sorte de Josei-Shonen ultra-competitif et qui est à la fois assez mauvais sur ses aspects shonen, sur ses aspects josei et pas forcement intéressant sur la compétition. Il n'en reste pas moins que Chihayafuru est un magnifique manuel en 52 épisodes du Karuta , et que le Karuta est un jeu assez présent dans la culture japonaise, que vous retrouverez dans certains autres animés (dans beaucoup en fait) au détour d'une scène ou d'une référence, sous le nom de "jeu aux 100 poèmes", de "Karuta au 100 poèmes" ou de "Karuta", depuis Chihayafuru j'ai vu 3 animés et dans chacun j'y ai trouvé une scène en référence au Karuta ! Comme quoi...
Donc la référence est très très utile et enrichissante. Ce n'est parfois pas très fun à regarder, mais à la fin je ne regrette pas forcement. Surtout qu'au bout de 52 épisodes, malgré les maladresses, on finit un peu par s'attacher aux persos et à leurs histoires... syndrome de Stockholm comme je le disais
Je regrette simplement que les auteurs ait choisi cette voie pour parler du Karuta. Je préfère largement quand un animé tourne autour de la discipline pour nous parler des gens qui la pratique, et non frontalement de la discipline en elle même, ça emmène trop d'embuche. J'aurais préféré un animé sur le Karuta qui emprunte la façon de faire d'un Barakamon sur la calligraphie (ne nous parle pas des techniques de calligraphie mais d'un calligraphe et seulement indirectement de la calligraphie) ou d'un K-on (ne nous parle pas de la façon de faire un petit groupe pop ou du placement des doigts sur la guitare, mais des gens qui constituent ce groupe).
Donc je sais pas, au pif : 7/10 ou 8/10, parce que je suis gentil et qu'après 52 épisodes je me suis habitué à ces défauts au point d'avoir tout de même un peu envie de voir la S3. Mais jamais je ne reverrais cet animé une seconde fois, pas moyen
TL;DR : ChihayaFuru est un animé difficile sur certains points et lourdement imparfait. Mais il est aussi le seul à nous parler frontalement du Karuta, l'un des jeux les plus connu du japon traditionnel qu'on retrouve en référence dans de nombreux autres animé également, au détour d'une scène ou d'une autre (c'est un jeu pour le nouvel an par exemple). Donc Chihayafuru est aussi un animé unique et irremplaçable pour celui qui s’intéresse à la culture japonaise. Si c'est votre cas et que les défauts sus-cités ne vous font pas peurs, jetez vous à l'eau ! Mais si vous cherchez juste un animé pour la détente ou un Josei pour les aspects amour et amitié : fuyez.