(Avertissement. Ceci est une analyse ExpertCPC(tm)(c)(r) réalisée au doigt mouillé. Prenez vos précautions avant toute manipulation. N'hésitez pas à corriger, commenter et compléter. Merci, keep up the good work and prevent accidents.)
Dark Souls
On va l'expédier en vitesse ok S'il a créé un genre à lui seul, il a aussi répandu partout son système de combat, mais, selon moi, c'est lui aussi qui a imposé la formule du metroidvania à la plupart des level designs même s'il a eu des précurseurs hors Metroid et Castlevania, tels que Shadow Complex et Batman.
Minecraft
Comme tous les mégasuccès, le LEGO 2.0 de Notch a engendré un trillion de clones, de Terraria à Stonehearth en passant par... les jeux LEGO officiels comme LEGO Worlds; la plupart du temps foirés et/ou jamais terminés (dernier en date : Cube World), mais il a aussi imposé le jeu de construction (et de destruction) comme nouveau moyen d'exploiter la puissance des machines. Sans Minecraft, on n'aurait pas eu Planet Coaster, Space Engineers, Besiege, voire Kerbal Space Program, et peut-être pas non plus des idées dérivées comme PC Building Simulator.
Dwarf Fortress
Le jeu expérimental des frères Adams est un tel foisonnement d'idées qu'elles ne pouvaient qu'irriguer tous les game designs (à commencer par Minecraft lui-même). De la plus petite (définir une zone comme dans Banished) à la plus essentielle : l'idée de gameplay et de narration émergents, de sculpture du monde, de gestion indirecte (elle-même issue de Settlers), mais aussi de génération procédurale et, surtout, c'est Dwarf Fortress qui réinvente le rogue-like (j'avais jamais entendu parler de Rogue avant 2011) et qui va faire d'un tiers des jeux qui ont suivi des rogue-machin, que ce fût pertinent ou pas. L'une de ses formules dérivées étant le Majora's Mask-like qui nous a donné les Minit et Outer Wilds. Et le pixel art dans les jeux indés, vient-il de là ?
The Walking Dead : saison 1
TellTale, après avoir repris le flambeau du jeu d'aventure (rendu épisodique dès Sam & Max), a contribué à le redéfinir grâce aux mécaniques narratives du jeu de rôle. Ils ont abandonné les énigmes qui n'avaient généralement pas grand chose à voir avec l'histoire se déroulant, et recentré le gameplay sur l'intrigue et les choix. J'aurais pu citer Heavy Rain avant lui, mais le jeu de zombies a eu une influence bien plus décisive en imposant le feuilletonesque dans le jeu à l'ère du triomphe de la série TV (on ne comptera plus les jeux découpés en épisodes), et les embranchements narratifs qui devinrent un grand casse-tête: illusion ou influence réelle ? Exemples: King's Quest, Life is Strange, Kentucky Route Zero...
DayZ
Si Minecraft introduit des mécaniques de survie, c'est le mod de Dean Hall, en l'affiliant à l'ancêtre Robinson's Requiem, qui lui donne les codes qui se répandront partout par la suite, de Don't Starve à Subnautica en passant par SCUM ou Raft. Sortir un jeu de survie dans les années 2010, c'est l'assurance de vendre direct 500 000 copies en accès anticipé sur Steam, et de ne jamais sortir de l'accès anticipé, car presque tous les projets sont des fiascos, faute de savoir exactement où aller (sauf The Forest, Rust et deux-trois autres). Brendan Greene sera assez malin pour en tirer l'idée du battle royale. Immersives ou chiantes, ces mécaniques de gestion de l'avatar se retrouvent jusque dans RDR 2, Kingdom Come ou Star Citizen.
Batman Arkham Asylum
En gros, tous les systèmes de combat qui n'ont pas été du Souls ont été du BTA à la Arkham. Les Mordor en sont sans doute le plus bel exemple. Quand ce n'est pas la formule entière qui est repompée par Spiderman.
Wasteland 2
Dès son Kickstarter, en sortant le RPG de l'ambition cinématique du AAA à la Mass Effect et en l'associant aux souvenirs de la 2D grand public de Fallout et Baldur's Gate, Brian Fargo donne le coup d'envoi d'un nouvel élan créatif. En envoyant le signal qu'on peut faire du RPG et le vendre pour un budget pas trop élevé, Wasteland a permis au genre de revenir sur lui-même, son état, ses progrès, ses régressions et par-delà, ses nouvelles possibilités. C'est ainsi qu'on a vu arriver les Age of Decadence, Underrail, Sunless Sea et compagnie, pour finir dans l'apothéose d'un Disco Elysium.
Dear Esther
J'ai cherché et il me semble que c'est le premier walking simulator moderne. Ces jeux faits presque intégralement de balade, d'exploration et de discute, et qui sont du coup plus centrés sur une expérience sensorielle, émotive ou intellectuelle, toujours plus proche du film interactif. A partir de là, tout a été possible : Gone Home, Firewatch, What Remains of Edith Finch, jusqu'aux trucs plus expérimentaux : The Stanley Parable, NaissanceE, et même Death Stranding. On n'est pas loin non plus des Walking Dead. Ca a aussi été un des principaux genres de la VR renaissante, bien adapté, codifié et moins coûteux.
The Witcher 3
S'il recueille les influences précédentes, Witcher 3 apporte sa pierre; d'abord en redéfinissant la mise en scène de type cinématographique, en se rapprochant de l'esthétique à la mode de la série TV type Game of Thrones, en lui donnant un supplément d'âme, un ton plus mûr - même s'il reste des scories très adolescentes. Ensuite, après Never Alone, en convainquant les développeurs d'une industrie de plus en plus mondialisée qu'il était possible de ne pas tout centrer sur les mythes anglo-saxons, même en reprenant leurs codes. Ainsi verra-t-on de plus en plus de jeux parler du pays de leurs créateurs : Aurion, Detention, Dandara...
Team Fortress 2
Le passage du jeu de Valve en f2p a permis d'en faire un phénomène et d'accroître grandement la base de clients de Steam. Une des raisons principales était sa DA cartoonesque issue de l'esthétique de l'animation américaine CGI, inédite dans un FPS, qui a largement contribué à attirer un public très élargi. Doit-on y voir le précurseur de l'esthétique smartphone ? En tout cas, ses successeurs Overwatch et Fortnite vont encore en élargir l'influence sur de multiples productions. Le gritty adolescent, c'est mal vu, l'ethéré-abstrait indé, c'est pour les hipsters. L'iconique coloré, c'est ça qui vend !
Papers, Please
No politics in my video games ! Ca va être compliqué depuis le jeu de Lucas Pope, premier vainqueur du GOTY CPC. En 2013. Les gamers sont désormais adultes, responsables, citoyens et électeurs. Ils ont leurs idées et n'hésitent pas à le dire sur twitter. Pope est sans doute le premier à articuler le gameplay de jeu vidéo autour d'une réflexion politique. Orwell, Not Tonight, Reigns, We the Revolution en sont les descendants directs, mais les questions se nichent désormais au plus profond du moindre AAA. Sans doute, là aussi, la marque de la série Game of Thrones, qui a introduit la politique politicienne au coeur de l'objet geek.
Defense of the Ancients
DOTA, en inventant le MOBA (et en tuant le père-RTS traditionnel au passage), aura été le marqueur d'un des genres les plus populaires de la décade. Comme dans le MMO, la plupart des MOBA ont fini par s'écrouler, ne laissant qu'un ou deux monstres s'écharper dans les arènes de l'eSport avec leurs foules ferventes et l'argent que brasse cette nouvelle industrie médiatique majeure. Il est difficile de passer à côté : si vous dites "je joue beaucoup aux jeux vidéo" à des gens qui n'y jouent quasi pas, il y a des chances qu'ils vous répondent "ah, League of Legends ?". Le jeu le plus joué au monde.
En arrivant au bout de cette litanie, je m'avise que j'ai surtout parlé, en fait, de ce que je connaissais moi du jeu vidéo : essentiellement PC et occidental, pas mal tourné sur l'indé triple I ou le AA, délaissant pas mal de genres et de styles comme l'horreur ou le multi... donc non seulement j'ai pu dire des conneries, mais j'ai laissé de grosses lacunes. Qu'en pensez-vous.