Envoyé par
DangerMo
Bon, je vais même pas mettre d'émoticones chialeur, mais ouais... Morricone quand même.
Je sais pas si je suis le seul dans ce cas, mais il est une des très rares personnes qui m'a fait prendre conscience qu'on peut être le contemporain d'un génie.
Que si d'autres bien avant nous ont pu profiter d'opéras tous frais tout beaux interprétés par Mozart en personne, ou ont eu la chance de voir Beethoven s'installer au piano pour faire écouter un extrait de sa nouvelle symphonie, ou bien qu'il y'a forcément un un mec comme vous et moi qui livrait du bois chez Michel Ange alors qu'il était en train de bosser sur une sculpture....
Bref, confortablement installé dans notre 21ème siècle où on va trop souvent se plaindre de la masse de trucs médiocres qui nous entoure et nous font regretter de pas avoir un âge doré des Grands Artistes, et bien depuis longtemps je me suis rendu compte que nous avions nous aussi nos Génies, véritables. Et ce, grâce à Morricone.
Un musicien, payé pour illustrer des trucs visuels, qui parfois faisait des trucs destinés à juste être écoutés. Un artisan, donc, qui prenait du pognon pour honorer des commandes... comme Mozart, comme Beethoven, comme Michel Ange. Mais ce qui les distingue de Charles Sanzot, artisan boucher, c'est qu'ils avaient un truc en plus.
Parce que quand on se penche sur l'oeuvre de Morricone, qui est un des trucs les plus foisonnants que je connaisse, il faut être sourd et pas avoir de coeur pour pas voir que ce mec touchait au divin. Il a exploré quasiment tous les styles et les a métissé, magnifié, avec le truc en plus, cet espèce de super pouvoir qui fait qu'il savait utiliser les techniques ou les instruments les plus incongrus pour susciter, automatiquement, et contre le gré de la personne qui écoute, une sensation profonde, de joie, de vertige ou de panique. Un fabricant d'émotions pures, de la drogue sous pochette cartonnée.
Après, il a eu pour lui l'avantage du timing, de se retrouver en tant que musicien a devoir prendre des commandes à une époque où ce qui était le plus "facile" était de faire de l'illustration sonore, pour du chanteur de variétoche qu'on produisait à la tonne à une époque où les disques se vendaient par millions, pour de la radio qui était encore très écoutée et bien sûr pour du cinéma, surtout en Italie qui devait avoir 5 ou 6 films différent en tournage chaque semaine à l'époque. Et quel format rêvé pour un musicien qui a trop d'idées en tête que la bande originale : le terrain parfait pour expérimenter les variations sur un même thème. Et à ce jeu là, Morricone aura été, et sera certainement encore longtemps, inégalé. Du remplissage intelligent qui lui permettait d'ouvrir plein de nouvelles pistes, pistes à creuser pour le prochain film, pour la prochaine commande.
J'ai longtemps ramassé tout ce que je pouvais sur Morricone, mais comme je le disais plus haut, sa production est bien trop foisonnante et un cauchemar de complétiste, alors [MODE Je risque me faire bannir] j'ai craqué il y'a quelques années de ça, et j'ai fini de compléter tout ce qu'il me manquait de façon numérique et illégale, et je ne peux que vous inciter à faire de même, parce qu'après, il y'a un seul truc à faire : activer un mode random et laisser tourner, un morceau, une idée, et quand un truc vous ouvre vraiment les oreilles, chercher le titre, chercher l'album et l'écouter en entier pour voir d'où ça vient et où ça va [/MODE je risque me faire bannir].
Honnêtement, une activité tout ce qu'il y'a de plus sain, laisser tourner une intégrale de Morricone dans le fond.
Petite pensée à quelques gens qui l'ont accompagné très longtemps et font partie intégrante de son univers et de son son : Bruno Nicolai, Edda Dell'Orso & Alessandro Alessandroni...
RIP Maestro