Grand_Maître_B
08/10/2008, 20h36
Le droit, c'est de la magie. Réfléchissez bien, vous verrez que ce n'est pas une comparaison idiote. Nous évoluons tous dans une réalité sociale composée de règles qui définissent nos interactions. Dans l'univers sensible, ce sont les lois physiques qui s'appliquent, dans le monde social, ce sont aussi des lois, sauf que celles-ci, on peut les changer pour les utiliser subtilement dans un sens ou dans l'autre, s'en servir.
Dans cette perspective, considérez-vous comme sujets à ces lois comme dans la réalité sensible, sauf que dans la réalité sociale, lorsqu'une enclume fonce métaphoriquement parlant sur votre tête à toute vitesse, vous pouvez invoquer une force occulte pour faire dévier sa chute, la faire tomber sur quelqu'un d'autre, voire la récupérer pour la transformer en pomme et la manger. Pour ça, vous avez besoin d'un intermédiaire entre les forces occultes et vous.
Visualisez donc les avocats comme des magiciens qui tentent de modifier la réalité à votre avantage, les juges comme des démiurges qui décident si oui ou non, ça marche dans votre sens, et le législateur comme un dieu qui crée les lois qui font que l'enclume fonce sur votre tête.
Un dieu fou, aveugle et parfois stupide, mais un Dieu quand même, autant vous y faire. Mais attention, ça n'est pas un Dieu unique, loin de là. Notre vie sociale est régie par un panthéon complexe de divinités hiérarchisées. En France nous avons donc des demi-dieux (qui prennent des actes règlementaires, genre les maires et préfets), des dieux assez puissants (qui font les lois, l'Assemblée nationale et le sénat) et, si ce n'est au sommet, en tous les cas très haut, nous avons l'Europe qui gère l'espace social de 27 pays, ce n'est pas rien. Si je vous raconte tout ça, c'est parce que vous avez vraiment intérêt à vous y intéresser, ce n'est pas tout le jour que l'on peut voir un dieu à l'ouvrage. Alors, comme toujours, prenez votre petite pilule et suivez l'humble magicien (version doctor strange et pas Gandalf s'il vous plait, je tiens à mon costard de super-héros) que je suis.
Si vu de loin on peut concevoir l'Europe comme un Dieu, il faut en réalité affiner et considérer que c'est un assemblage de créatures divines. C'est en effet un collectif de citoyens (le parlement qui représente la puissance démocratique), de ministres (le Conseil de l'Union européenne) et de chefs d'État (le conseil européen), ces derniers représentant la puissance technocratique. Tout ce petit monde doit faire des textes de loi dans l'intérêt de l'Europe (surveillé par la commission européenne) qui a du coup le rôle d'une divinité gardienne, et appliqués par des tribunaux (la Cour de justice et le Tribunal de première instance) qui représentent la divinité de la justice.
Mais quel est l'acte créateur de cette cosmogonie européenne ? Le big bang ? Meuh non, ne soyez pas déraisonnable, on cause occulte ici. Au commencement était le verbe tel que relaté dans les Traités. L'Union européenne fonctionne en effet sur la base de traités (traité de Rome, traité de Maastricht...) signés entre les États membres et qui détaillent les institutions, leur fonctionnement, mais aussi les droits et obligations de chaque État membre, etc...
Toutes les autres normes prises par l'Europe sont du "droit dérivé". Dérivé de quoi ? ben, des traités pardi. C'est grâce aux Traités que les institutions européennes peuvent prendre des normes, qui sont donc dérivées desdits traités.
L'Union européenne prend donc des textes de loi dans tous les domaines, et par textes de loi on entend:
- Le règlement est l'oeuvre la plus aboutie des puissances européennes. C'est un texte de loi qui est obligatoire dans tous ses éléments dès sa publication, sans aucune mesure de transcription nationale. Tous les États membres doivent suivre le règlement, sans pouvoir invoquer telle ou telle particularité nationale. Il s'applique tel quel pour tous. Si notre loi nationale est contraire à un règlement, elle devient de facto caduque, elle ne peut plus s'appliquer. Notre dieu national est inférieur au dieu de l'Europe, rien à faire. Le règlement est adopté soit par le Conseil de l'union européenne et le Parlement ensemble (après discussion de ces 2 entités pour s'accorder sur une version définitive du texte) ou par la Commission seule.
- la décision qui est comme le règlement, sauf qu'il y a un destinataire précis (un État, en général, mais ça peut être une région ou même une entreprise. Elle est adoptée soit par le Conseil de l'union européenne, soit par le Conseil de l'union européenne avec le Parlement européen, soit par la Commission seule.
- la directive est une norme qui fixe un but, mais qui laisse les États membres libres de choisir les moyens de l'atteindre dans un délai fixé. Le dieu européen laisse les dieux locaux le soin d'adapter la réalité sociale en fonction du but à atteindre. Ça permet de respecter les spécificités nationales. Alors, parfois, on assiste à des révoltes dignes des psychos-drames de l'Olympe. Le dieu français par exemple, refuse d'adapter une directive. Dans ce cas, la directive peut être -invoquée par un magicien efficace au profit de son client, mais sous certaines conditions uniquement, notamment si la directive pose une obligation claire de faire ou de ne pas faire et qu'elle soit suffisamment précise pour être applicable sans avoir fait l'objet d'une application par le dieu local. On parle d'effet direct de la directive. Comme pour le règlement, la directive est adoptée soit par le Conseil de l'union européenne et le Parlement ensemble (après discussion de ces 2 entités pour s'accorder sur une version définitive du texte) ou par la Commission seule.
Après, on a aussi des textes non contraignants que les instances européennes peuvent prendre, dénommées recommandations, avis et autres résolutions, mais je n'entrerais pas dans ces détails, peu utile à la compréhension des lois qui influent sur notre hobby.
Bilan de tout ça ? Comme vous le voyez, nos divinités européennes ne sont pas toutes égales entre elles. La divinité démocratique est la plus faible, elle ne peut rien créer seule, elle doit toujours s'épauler de son petit collègue technocratique (le Conseil de l'union européenne). Le Conseil de l'union européenne justement, est un peu plus fort, car, s'il a souvent besoin aussi de s'épauler de son collègue démocratique, il peut parfois prendre des décisions tout seul. La technocratie est donc un peu plus puissante que la démocratie en Europe. Au sommet, vient donc la commission, qui, grâce à son rôle de gardien des intérêts de l'Europe, a le pouvoir de créer toute seule les normes qu'elle souhaite.
Si, à la lecture de cette bafouille, vous vous sentez tout petit petit, c'est normal. On l'est tous. Mais au moins, quand l'Europe sera évoquée dans une news, vous y verrez un peu plus clair !
Voir la news (1 image, 0 vidéo ) (http://www.canardpc.com/news-29632-l_europe__une_pilule_rouge_pour_tout_comprendre___ la_suite.html)
Dans cette perspective, considérez-vous comme sujets à ces lois comme dans la réalité sensible, sauf que dans la réalité sociale, lorsqu'une enclume fonce métaphoriquement parlant sur votre tête à toute vitesse, vous pouvez invoquer une force occulte pour faire dévier sa chute, la faire tomber sur quelqu'un d'autre, voire la récupérer pour la transformer en pomme et la manger. Pour ça, vous avez besoin d'un intermédiaire entre les forces occultes et vous.
Visualisez donc les avocats comme des magiciens qui tentent de modifier la réalité à votre avantage, les juges comme des démiurges qui décident si oui ou non, ça marche dans votre sens, et le législateur comme un dieu qui crée les lois qui font que l'enclume fonce sur votre tête.
Un dieu fou, aveugle et parfois stupide, mais un Dieu quand même, autant vous y faire. Mais attention, ça n'est pas un Dieu unique, loin de là. Notre vie sociale est régie par un panthéon complexe de divinités hiérarchisées. En France nous avons donc des demi-dieux (qui prennent des actes règlementaires, genre les maires et préfets), des dieux assez puissants (qui font les lois, l'Assemblée nationale et le sénat) et, si ce n'est au sommet, en tous les cas très haut, nous avons l'Europe qui gère l'espace social de 27 pays, ce n'est pas rien. Si je vous raconte tout ça, c'est parce que vous avez vraiment intérêt à vous y intéresser, ce n'est pas tout le jour que l'on peut voir un dieu à l'ouvrage. Alors, comme toujours, prenez votre petite pilule et suivez l'humble magicien (version doctor strange et pas Gandalf s'il vous plait, je tiens à mon costard de super-héros) que je suis.
Si vu de loin on peut concevoir l'Europe comme un Dieu, il faut en réalité affiner et considérer que c'est un assemblage de créatures divines. C'est en effet un collectif de citoyens (le parlement qui représente la puissance démocratique), de ministres (le Conseil de l'Union européenne) et de chefs d'État (le conseil européen), ces derniers représentant la puissance technocratique. Tout ce petit monde doit faire des textes de loi dans l'intérêt de l'Europe (surveillé par la commission européenne) qui a du coup le rôle d'une divinité gardienne, et appliqués par des tribunaux (la Cour de justice et le Tribunal de première instance) qui représentent la divinité de la justice.
Mais quel est l'acte créateur de cette cosmogonie européenne ? Le big bang ? Meuh non, ne soyez pas déraisonnable, on cause occulte ici. Au commencement était le verbe tel que relaté dans les Traités. L'Union européenne fonctionne en effet sur la base de traités (traité de Rome, traité de Maastricht...) signés entre les États membres et qui détaillent les institutions, leur fonctionnement, mais aussi les droits et obligations de chaque État membre, etc...
Toutes les autres normes prises par l'Europe sont du "droit dérivé". Dérivé de quoi ? ben, des traités pardi. C'est grâce aux Traités que les institutions européennes peuvent prendre des normes, qui sont donc dérivées desdits traités.
L'Union européenne prend donc des textes de loi dans tous les domaines, et par textes de loi on entend:
- Le règlement est l'oeuvre la plus aboutie des puissances européennes. C'est un texte de loi qui est obligatoire dans tous ses éléments dès sa publication, sans aucune mesure de transcription nationale. Tous les États membres doivent suivre le règlement, sans pouvoir invoquer telle ou telle particularité nationale. Il s'applique tel quel pour tous. Si notre loi nationale est contraire à un règlement, elle devient de facto caduque, elle ne peut plus s'appliquer. Notre dieu national est inférieur au dieu de l'Europe, rien à faire. Le règlement est adopté soit par le Conseil de l'union européenne et le Parlement ensemble (après discussion de ces 2 entités pour s'accorder sur une version définitive du texte) ou par la Commission seule.
- la décision qui est comme le règlement, sauf qu'il y a un destinataire précis (un État, en général, mais ça peut être une région ou même une entreprise. Elle est adoptée soit par le Conseil de l'union européenne, soit par le Conseil de l'union européenne avec le Parlement européen, soit par la Commission seule.
- la directive est une norme qui fixe un but, mais qui laisse les États membres libres de choisir les moyens de l'atteindre dans un délai fixé. Le dieu européen laisse les dieux locaux le soin d'adapter la réalité sociale en fonction du but à atteindre. Ça permet de respecter les spécificités nationales. Alors, parfois, on assiste à des révoltes dignes des psychos-drames de l'Olympe. Le dieu français par exemple, refuse d'adapter une directive. Dans ce cas, la directive peut être -invoquée par un magicien efficace au profit de son client, mais sous certaines conditions uniquement, notamment si la directive pose une obligation claire de faire ou de ne pas faire et qu'elle soit suffisamment précise pour être applicable sans avoir fait l'objet d'une application par le dieu local. On parle d'effet direct de la directive. Comme pour le règlement, la directive est adoptée soit par le Conseil de l'union européenne et le Parlement ensemble (après discussion de ces 2 entités pour s'accorder sur une version définitive du texte) ou par la Commission seule.
Après, on a aussi des textes non contraignants que les instances européennes peuvent prendre, dénommées recommandations, avis et autres résolutions, mais je n'entrerais pas dans ces détails, peu utile à la compréhension des lois qui influent sur notre hobby.
Bilan de tout ça ? Comme vous le voyez, nos divinités européennes ne sont pas toutes égales entre elles. La divinité démocratique est la plus faible, elle ne peut rien créer seule, elle doit toujours s'épauler de son petit collègue technocratique (le Conseil de l'union européenne). Le Conseil de l'union européenne justement, est un peu plus fort, car, s'il a souvent besoin aussi de s'épauler de son collègue démocratique, il peut parfois prendre des décisions tout seul. La technocratie est donc un peu plus puissante que la démocratie en Europe. Au sommet, vient donc la commission, qui, grâce à son rôle de gardien des intérêts de l'Europe, a le pouvoir de créer toute seule les normes qu'elle souhaite.
Si, à la lecture de cette bafouille, vous vous sentez tout petit petit, c'est normal. On l'est tous. Mais au moins, quand l'Europe sera évoquée dans une news, vous y verrez un peu plus clair !
Voir la news (1 image, 0 vidéo ) (http://www.canardpc.com/news-29632-l_europe__une_pilule_rouge_pour_tout_comprendre___ la_suite.html)