Vu
Barberousse d'Akira Kurosawa
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Fraîchement sorti d'une prestigieuse école de médecine et promis à un poste au service du shogun lui-même, un jeune médecin se retrouve assigné dans le dispensaire d'un quartier pauvre d'Edo. L'établissement est dirigé par le docteur "Bareberousse", strict et respecté.
J'en avais jamais entendu parlé, et avec un titre pareil je ne savais pas à quoi m'attendre. Je me suis même demandé dans quoi je m'embarquais quand j'ai vu que le film durait 3 heures
J'avais tort de douter, c'est un des films les plus forts et beaux que j'ai vu depuis longtemps. J'ai trouvé le film fantastique.
Le film est très riche : via la médecine (et des sujets classiques sur le rôle des médecins, les relations avec les patients etc.) on aborde des sujets politiques et de société : les ravages de l'ignorance et de l'ingérence, la justice ou la pauvreté. Et c'est fait par un grand cinéaste, tout ça est présenté sans en faire des caisses ni essayer de nous accabler : ça donne à réfléchir et c'est au service du film.
Le film est centré autour des médecins et de la vie au dispensaire avec des histoires secondaires qui font office de chapitres, chacune étant consacrée à un patient particulier. Et les histoires de ces patients sont bouleversantes : avec le travail des médecins, on découvre le mal dont souffrent les patients mais surtout leur passé tragique qui les a amené au dispensaire. Par exemple il y a l'histoire d'un homme qui souffre d'une maladie "de" cœur, je vous mets au défi de garder les yeux au sec
. Je redoute ce genre de scènes faites pour tirer des larmes d'habitude, mais là c'est tellement beau, tellement bien raconté, et utilisé à bon escient pour tenir le propos du film que ça passe tout seul (comme les trois heures de film d'ailleurs). C'est pas déprimant, au contraire : c'est triste mais le but est d'en ressortir grandi parce que la vie continue. C'est ce qu'apprend le jeune médecin arrogant qui fini (évidemment) par se sentir impliqué par son rôle de médecin.
Les acteurs sont excellents, quelque soit leur âge : les enfants, qui ont des rôles durs, sont impeccables. Yûzô Kayama, l'acteur qui joue le jeune médecin est très crédible pour passer du crétin arrogant au médecin impliqué qui apprend au contact du docteur Barberousse.
Le noir et blanc est sublime, avec des jeux d'ombres dans des pièces étriquées, surpeuplées et éclairées à la bougie. La qualité de l'image est bonne, de ce côté là je me suis régalé.
Il y a bien un truc qui me gêne dans le film, c'est le docteur Barberousse qui ne m'a pas l'air maîtrisé. Toshirô Mifune offre de superbes scènes, très fortes, ça j'en suis content. Par contre, le personnage me semble pas bien écrit : on nous en parle comme un tyran ultra strict mais je n'ai rien vu de tel dans le film. Le type est (à peine) sévère mais juste. En plus on essaye de nous faire comprendre que ce type a des choses à se reprocher et qu'il n'est pas si noble, mais de ce que j'ai vu, pas de quoi se réveiller la nuit. Et puis il y a cette scène de bagarre qui fait plaisir sur le coup mais une minute plus tard je me demande ce que ça venait faire là. La réalisation compliquée du film (différents entre Kurosawa et Mifune) expliquerait bien ce problème.
Je pense que c'est un film à voir absolument pour peu qu'on soit un brin attiré par le sujet. Pour moi c'est un film sublime et très fort. Apparemment c'est pas considéré par un classique et c'est pas à moi qu'il faut demander pourquoi.