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  1. #1
    Pour le très long dossier de Canard PC 278 sur les youtubeurs du jeu vidéo, Fantasio nous a longuement parlé de son expérience avec The Fanta & Bob Show. Tellement longuement, même, que nous n'avons pas pu tout passer dans les pages du journal. Alors comme on est sympa, et avec son accord, voici les parties inédites de notre conversation.
    ***
    Comment as-tu découvert la vidéo et commencé comme Youtubeur ?
    J'étais passionné d'Internet depuis 1998, je me suis excité dans les premiers jours de Google, j'étais fana d'IRC, bref j'y ai passé beaucoup de temps. YouTube, c'est un coup de bol, une opportunité. Il y avait très peu de podcasters YouTube dans le jeu vidéo fin 2010 à la sortie de Call of Duty Black Ops et au début de Minecraft en version alpha. J'avais acheté les deux et étrangement, je ne me suis pas fait pigeonner là où je pensais ! Le soir même, en voyant les modèles 3D de Black Ops courir sur les murs avec des bugs de lumière, j'ai déchanté. J'ai quitté COD pour toujours, alors que j'étais fan.
    Je me suis mis à Minecraft grâce à un Américain qui avait fait un guide "How to survive and thrive in Minecraft"; je m'en suis inspiré. Parce que moi, quand j'ai mis le doigt dans Minecraft, je n'y comprenais rien. Et du coup, je me suis dit : "Mais c'est pas possible qu'il n'y ait rien en français pour faire connaître ça !" Du coup, j'ai quasiment utilisé son plan, mais j'ai fait mon guide beaucoup plus vite que lui, j'ai laissé les maladresses qui donnaient du charme et un côté humoristique. Voilà comment a démarré ma chaîne Minecraft.

    Et la monétisation, c'est venu à quel moment ?
    J'avais entendu parler de trucs, mais avant c'était très opaque. Il y avait un système de partenariat. C'était accessible à certains qui avaient fait leurs preuves en termes de vues, d'abonnés, de régularité… c'était un peu comme le jackpot. À un moment tu reçois un mail de YouTube et tu sautes au plafond : ça y est tu es passé partenaire, et à partir de ce jour-là tu te retrouves avec des vidéos monétisables. Moi ça m'est arrivé pour mes 15 000 abonnés et six ou huit mois d'activité. Aujourd'hui, c'est accessible à n'importe qui. La gratification pour la qualité ou l'endurance, c'est terminé sur YouTube, et on est dans l'immédiateté. Je pense que ça participe à la médiocrité des contenus, parce que les gens sont prêts à tout pour monétiser quelques vidéos. Mais à cette époque, c'était uniquement les chaînes qui avaient fait leurs preuves et moi il m'a fallu du temps.
    D'une certaine manière, nous, on a tracé une route en tant que pionniers, j'ai vraiment l'impression d'avoir essuyé les pots cassés. Du coup, les questions sont venues après : "Comment fait diablox9 pour monétiser, alors que tu ne peux monétiser que là où tu as les droits d'auteur ?" Normalement, c'est strictement interdit. Moi, j'ai mis du temps à découvrir l'existence des Networks : ce sont eux qui négocient directement les droits d'auteur avec les éditeurs.
    Pour Minecraft pas de problème : mojang s'est fait connaître comme ça, en accordant à tout le monde le droit d'utiliser Minecraft. Il y a énormément de gens qui vivent de Minecraft du coup, que ce soit côté serveurs ou côté youtubeurs.

    Ça fait quoi d'être une célébrité sur YouTube ?
    La première fois que je suis allé en convention et que j'ai rencontré mes fans, ça m'a fait un choc psychologique puissant. Les fans nous prennent pour leur copain de récré et ce manque de distance peut donner le vertige. J'ai eu du mal à accepter cette admiration. Je pense que c'est le cas de beaucoup de youtubeurs, parce que la plupart de ceux que j'ai vu réussir étaient des personnes discrètes. Tout ça, c'était pour moi une épreuve difficile : le fait de prendre sur moi, et d'avoir le sourire pendant les vidéos, l'exposition sur Internet avec les effets de meutes… Nous avons une fonction de divertissement, mais nous sommes aussi les Community Managers de notre propre communauté, et cette communauté est énorme. Parfois, ça a été dur de faire la nounou pour des gamins dont certains sont complètement pourris-gâtés.

    Qu'est-ce que c'est, une bonne vidéo ?
    Ce serait prétentieux de dire que j'ai la recette. Il m'a fallu déjà longtemps pour avoir la recette d'une "bonne vidéo Fanta et Bob". Ça m'a pris deux ans pour comprendre ce qui fait que les gens aiment ce que je fais. Qu'est-ce qui les fait délirer ? Ce n'est pas une question technique : on s'est amélioré avec le temps tout de même, mais c'est pas ça. Le côté amateur, accessible, fait partie du succès. On n'a pas une boîte de prod' venue derrière nous, on n'a personne pour écrire nos dialogues. J'ai fait très attention à essayer de comprendre ce qui plaisait. J'ai posé la question sur Facebook et les réponses étaient les mêmes : on est un duo complémentaire, un sérieux, l'autre fou. Et on est de bonne humeur.
    Donc j'ai compris comment faire des vidéos pour leur faire plaisir, et c'est ça que je recherche. Ce n'est pas uniquement pour des raisons d'audimat, même si bien sûr les raisons d'audimat sont importantes.
    C'est aussi parce qu'avant, on était quasi seuls, tandis qu'aujourd'hui on est des milliers. Augmenter la qualité de nos vidéos, même si on est toujours que deux mecs derrière leur ordi qui font tout eux-mêmes, c'est nécessaire. Parce qu'il y a plein de jeunes qui veulent faire ce qu'on fait. Et si ça se trouve, ils ont plus de talent que nous. Si on veut garder ce job, il faut donner le top de ce qu'on peut donner. Et il faut avoir l'énergie de donner de l'énergie aux gens.

    Comment s'est passée l'expérience jeuxvideo.com ?
    Ils nous ont repéré au début de l'année dernière. Ça n'a duré que deux mois. Ça c'est très bien passé, on était bien traités, mais on n'était pas à l'aise et on perdait de l'ampleur sur YouTube à cause de ça. Les vidéos étaient bonnes, mais on était sous pression. Il fallait en faire deux par semaine, alors qu'on ne se sentait pas vraiment libres de nos dialogues. Après deux mois on est parti. On était aussi confronté à un public super exigeant : les jeunes de jeuxvideo.com c'est des requins, des piranhas. Faire les clowns pour ce public, c'était extrêmement éprouvant. Je n'avais qu'une hâte, c'était de partir, on n'en pouvait plus. C'était trop de pression pour nous à l'époque.

    Aujourd'hui, votre statut c'est quoi ?
    Moi je suis entrepreneur individuel, déclaré comme Webmaster à défaut de code précis. Je paye la TVA en émettant une facture correspondant au paiement de Google. Je considère qu'on est professionnalisés dans l'amateurisme. On fait tout nous-mêmes. Pour le public, on sera toujours des amateurs, même si je pense que comparé à d'autres, je sais clairement de quoi je parle. Le public nous aime pour ça. S'ils veulent voir du pro, ils vont sur jeuxvideo.com. Moi, je me considère comme professionnel parce que c'est devenu mon gagne-pain, mais je ne fais pas forcément mieux que d'autres personnes, qui sont meilleures que moi, mais qui ne gagnent pas leur vie avec.

    Mais vous, vous en vivez bien aujourd'hui ?
    Je sais qu'en France aujourd'hui, c'est scandaleux de gagner de l'argent, surtout dans un métier comme le nôtre. Surtout pour des jeunes et en période de crise. J'en parle quand même parce que quitte à ce que la vérité se sache, autant qu'elle soit bien dite. Mais il faut savoir qu'il y a aujourd'hui des pertes importantes qui viennent du fait que le youtubeur est 100 % dépendant de YouTube et de son network, qui peuvent changer les règles sans prévenir : les règles de comptabilisation des vues, des contrats… YouTube revoit le comptage des vues à la baisse et on perd 30 % de notre salaire en 3-4 mois. Récemment, il y a eu une chute vertigineuse des vues pour les plus gros youtubeurs. Moi j'ai des potes qui étaient juste au SMIC et qui se retrouvent d'un coup à 700 euros. Avec YouTube, il n'y a aucun contrat, c'est complètement opaque : il faut s'estimer heureux qu'ils nous payent.

    Les éditeurs de jeux sont de plus en plus présents, avec de l'argent à la clé…
    L'avantage de l'amateur, c'est une forme d'indépendance, mais une indépendance qui est remise en question aujourd'hui. Les éditeurs se positionnent et ils cherchent à prendre du pouvoir sur cette force médiatique.
    Mais aujourd'hui les éditeurs qui sont prêts à raquer sont plutôt rares. La plupart filent les jeux sans engagement. La plupart n'ont pas conscience du pouvoir et de l'influence qu'on a. Mais il y a des intermédiaires qui tirent leur épingle du jeu. Ils proposeraient du 30 euros les mille vues. Nous, on ne nous a jamais proposé plus de 12 euros les mille vues.
    Certains intermédiaires ont une liste de jeux des éditeurs avec qui ils travaillent sur lesquels il faut faire des vidéos, et il n'y a qu'à piocher. De toute façon, 90 % des fois où une vidéo sort en avant-première, c'est qu'il y a un deal. C'est évident que c'est de la promotion.
    Récemment, Electronic Arts a réuni tous les youtubeurs en France pour faire un grand copinage, le grand buffet des youtubeurs et EA Games. Il y a des choses qui se sont négociés, et certaines chaînes vont prendre quelques virages.

    Vous, vous avez eu des propositions directes et concrètes ?
    La plupart du temps, les éditeurs viennent nous demander de la pub gratuite. On a fait un contrat une fois. On en avait parlé aux fans et ils le savaient, c'était pour Resident Evil 6. On n'a pas fait de cadeau au jeu, on s'est amusé dessus et c'est ce qu'ils voulaient. Ils nous ont offert les PS3 et différents goodies pour le faire. Et on leur a fait de la publicité pour un montant totalement dérisoire quand tu sais aujourd'hui ce que certains éditeurs sont prêts à payer. Voilà notre compromission avec le Mal. Elle était affichée, mais ça nous pèse. Je sais que ce que je dis-là aura une incidence négative dans le futur pour nous, mais je préfère le mettre en avant parce que nous ne le ferons plus. Il faut comprendre qu'à l'époque, on ne gagnait pas ce qu'on gagne aujourd'hui. À part ça, je n'ai eu qu'une seule proposition avec un budget qui pouvait monter à 2 000 euros la vidéo. Une seule fois en deux ans, et pas par un gros éditeur.

    C'est assez difficile de faire parler les youtubeurs français sur leurs conditions de travail, financières notamment. Pourquoi est-ce que toi tu as décidé d'aborder la chose franchement aujourd'hui ?
    De ce que nous sommes en train de vivre, vous ne connaissez que le côté apparent de l'iceberg. Les médias sont très ignorants de ce qui se passe vraiment, du coup je pense qu'il y a des extrapolations inter-médias qui font que ça fantasme beaucoup.
    Ce sont des sujets délicats, notamment pour notre gestion d'image. Mais je pense que c'est bon que ça sorte et je pense que c'est bon que ça vienne de nous, même si ça ne plaira pas à certains, tant du point de vue professionnel que parmi les spectateurs.
    ***
    Retrouvez dans Canard PC n°278 l'intégralité de notre enquête de 13 pages intitulée "Youtubeurs : des influenceurs sous influence", avec l'interview originale de Fantasio au cours de laquelle il évoque les débuts difficiles, la rencontre avec son compère Bob Lennon, les questions d'argent et les problèmes d'indépendance.
    Le dossier a donné lieu à une émission coproduite avec arretsurimages.net, à laquelle participaient le Joueur du Grenier et Pomf, de O'Gaming TV / Pomf & Thud.
    Vous pouvez suivre les vidéos de Fantasio & Bob Lennon sur leur site web ou leurs chaînes Youtube : Fanta & Bob Minecraft et Fanta et Bob Games.
    PS: Autre bonus complémentaire inédit disponible sur le site, l'interview de Usul, du 3615 USUL.

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  2. #2
    Salut,

    Merci pour l'ajout, ça permet d'améliorer la perception de ces personnages.
    J'ai un peu regardé (suite à l'article de CPC) quelques vidéos de Minecraft, et j'ajouterai que ce qui peut plaire, c'est aussi la grande culture vidéoludique de Fantasio.
    J'ai bien apprécié une vidéo Minecraft sur une map Pokemon, alors que je n'ai jamais joué ni à l'un ni à l'autre, mais la passion et les explications étant là, c'était vraiment intéressant.

    Merci encore.

  3. #3
    Sympa la partie complémentaire .
    Some days, some nights, some live, some die in the way of the samurai
    Some fight, some bleed, sun up to sun down, the sons of a battlecry

  4. #4
    Pourquoi aucun kiosque autour de chez moi n'a de Canard PC

  5. #5

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