Les Rocks Stars du Jeu d'Aventure en Conférence Live
16 février [NdT : 2018]
Le 24 août 1990, CompuServe hébergeait une discussion en ligne ayant pour thème la conception de jeux d'aventure à laquelle étaient notamment présents Ron Gilbert, Noah Falstein, Bob Bates, Steve Meretzky, Mike Berlyn, Dave Lebling, Roberta Williams, Al Lowe, Corey and Lori Ann Cole, and Guruka Singh Khalsa. Il va sans dire qu'il s'agissait d'une incroyable réunion de stars du milieu du jeu d'aventure. A vrai dire, je ne pense pas avoir eu connaissance d'une autre réunion de ce type et de cette importance, qu'elle eut lieu en ligne ou non. Bob Bates, devenu un grand ami de ce blog à plus d'un égard, a retrouvé une transcription de cette conférence enterrée dans quelque coin sombre de son disque dur, et m'a fait la gentillesse de me la faire parvenir afin que je puisse la partager avec vous en ce jour.
Si vous êtes un lecteur régulier de ce blog, vous reconnaissez probablement tous les noms que je viens de lister, sauf peut-être celui de Khalsa. Toutefois, pour que vous puissiez ancrer cette chose dans le temps du mieux possible, laissez-moi prendre le temps d'expliquer où chacun(e) d'entre eux en était et ce sûr quoi il ou elle travaillait en ce mois d'août.
Ron Gilbert et Noah Falstein étaient chez Lucasfilm Games (qui fut peu de temps après renommé LucasArts). Gilbert avait déjà créé le classique Maniac Mansion quelques années auparavant, et était sur le point de voir publiée sa création la plus chère, qui aura un grand impact sur ses confrères designers et plus généralement sur les joueurs : The Secret of Monkey Island. Falstein avait conçu Indiana Jones and the Last Crusade pour Lucasfilm en 1989. En outre, leur éditeur venait de lancer Loom, signé Brian Moriarty, et dont l'interface radicalement simplifiée, la courte durée, et la relative simplicité des puzzles ont soulevé moults débats à l'époque.
Bob Bates, Steve Meretzky, Mike Berlyn, et Dave Lebling avaient tous écrit pour divers jeux pour le compte de feu-Infocom au cours de la précédente décennie. Bates avait récemment co-fondé Legend Entertainment, où il préparait son propre jeu Timequest et s'apprêtait à publier d'une semaine à l'autre Spellcasting 101: Sorcerers Get All the Girls, premier jeu post-Infocom de Meretzky, et tout premier jeu de Legend Entertainment. Berlyn était toujours du métier après son départ d'Infocom en 1985, ayant notamment créé Times in Tonetown pour Interplay. Il terminait une épopée de science-fiction nommée Alered Destiny chez Accolade, et allait bientôt embarquer dans les jeux Les Manley, deux clones de Leisure Suit Larry, pour le compte du même éditeur. Lebling était dans ce qu'on pourrait appeler une impasse après la fermeture d'Infocom l'année précédente, encore incertain quant à choisir s'il resterait dans l'industrie du jeu vidéo ou non. Il tranchera finalement par la négative, et ne participera à la conception d'aucun autre jeu.
Roberta Williams, Al Lowe, Corey et Lori Ann Cole, ainsi que Guruka Singh Khalsa travaillaient tous chez Sierra. Williams était sur le point de d'achever la création de son dernier King's Quest, le premier à employer des graphismes VGA en 256 couleurs et une interface pointer-et-cliquer, et le premier publié sur CD-ROM car doté de dialogues audio. Le couple Cole allait terminer Quest for Glory II: Trial by Fire, qui deviendra le dernier jeu EGA en 16 couleurs de Sierra, et le denier doté d'un interpréteur (parser). Al Lowe était, comme à son habitude, en plein développement de son prochain jeu Leisure Suit Larry, qui employait lui aussi le tout nouveau tout beau moteur de Sierra, dépourvu d'interpréteur.
Khalsa se trouve être l'unique non-designer du groupe, et comme dit précédemment, le seul dont le nom ne dit probablement rien à mes lecteurs de longue date. Il était l'un de ces héros tus que l'on croisait dans les coulisses de nombreux développeurs. Chez Sierra, il jouait un rôle somme toute comparable à celui que jouait l'indispensable Jon Palace chez Infocom. En tant que "producteur" des jeux d'aventure Sierra, il s'assurait que les designers bénéficiait de l'aide nécessaire ; agissant comme un tampon entre eux et le personnel plus orienté "business", il menait sa barque pour améliorer leurs jeux de multiples façons. Fidèle à son rôle d'homme de l'ombre, il ne répond ici qu'à une seule question.
Nous retrouvons tous ces participants aux prises avec les nombreuses tensions qui ont émaillé leur terrain en 1990 : le besoin urgent d'attirer de nouveaux joueurs afin de surmonter l'escalade des budgets de développement, l'arrivée menaçante du CD-ROM et d'autres nouvelles technologies disruptives, le destin du texte à l'aube de cette nouvelle ère multimédia, la frustration de ne pas toujours être en capacité de créer des œuvres novatrices ou marquantes, à cause d'un public qui, dans l'ensemble, paraît se satisfaire des habituels jeux de fantasy ou d'humour. Il est intéressant de découvrir comment les designers, chacun de leur côté, répondent à ces problèmes ; au même titre qu'il est intéressant de voir comment ces réponses se sont concrétisées dans les jeux. A mille lieux de la pensée unique, le groupe échange avec fougue sur de nombreux thèmes.
J'ai nettoyé la transcription qui suit pour la rendre lisible, en supprimant un paquet de commentaires hors-sujet, en en corrigeant l'orthographe et la grammaire, en retouchant légèrement l'ordre du flot des paroles afin d'apporter plus de cohérence à l'ensemble. J'y ai également ajouté quelques annotations, à des fins de clarification, ou encore pour placer mes commentaires. Toutefois, j'ai veillé à ne pas céder à la tentation de dogmatiser les propos tenus. Vous connaissez tous, déjà, mon opinion sur les nombreux sujets abordés ici. Aujourd'hui, je laisse la parole aux designers. J'espère que vous trouverez leur conversation aussi intéressante et satisfaisante qu'elle fut pour moi.
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C'est le moment de répondre aux questions. Avant de commencer, je tiens à remercier Eeyore, Flying Gerbil, Steve Horton, Tsunami, Hercules, Mr. Adventure, et Randy Snow pour m'avoir soumis leurs questions... et je leur demande de m'excuser pour les avoir quelques peu transformées. Et maintenant - roulement de tambour... allons-y pour la première question !
Q : Projetez-vous cinq ans plus tard, avec en tête tous les développements technologiques qui incluent les CD-ROM, des machines plus puissantes, etc. Décrivez à quoi ressemblera le jeu d'aventure "idéal". En quoi sera-t-il différent des jeux d'aventure actuels ?
Roberta Williams : Je pense que "cinq ans plus tard" peut être ramené à un an ou deux seulement. Les jeux d'aventure qui seront publiés dans un an ou deux bénéficieront de graphismes, d'une jouabilité et de sons de qualité "professionnelle", et cela va perdurer — l'avènement de la standardisation, si vous préférez. Comment faire mieux que de images réalistes au point de ressembler à des peintures ou à des photos ? Comment faire mieux que des voix et des musiques enregistrées en qualité CD ? Comment faire mieux que des animations capturées par une caméra ou créées par un animateur professionnel ? Voilà le genre de jeux d'aventure que le public entreverra dans un an ou deux. Quand les jeux d'aventure atteindront un certain degré de sophistication tant dans leurs graphismes que dans leur jouabilité, la standardisation va s'imposer ; et cela sera une bénédiction pour tous, pour les clients comme pour les développeurs. Après ça, les pistes d'amélioration se réduiront à la performance d'exécution sur telle ou telle machine ; le look des jeux, lui, restera le même pour un bon bout de temps.
Dave Lebling : Mais si ces merveilleuses images et ces sons Hi-Fi sont propulsées par un interpréteur poussif, ou une utopique "interface sans interpréteur", s'agira-t-il d'une grande amélioration ? Je ne crois pas. Nous pourrions tout à fait dépenser 2 millions, voire 5 millions, pour développer une version plus jolie de Colossal Cave. Améliorons plutôt l'histoire et l'interface ! Cela ne veut pas dire qu'on devrait se contenter d'aventures textuelles, mais ne réduisons pas les jeux d'aventure à leurs graphismes.
Steve Meretzky : Je pense que, dans le futur, la portée des jeux ne sera pas limitée par le matériel, mais plutôt par le marché. A moins que le marché des jeux d'aventure ne s'étende, il ne sera pas viable, économiquement parlant, de créer des environnement extra-larges, alors même que le matériel sera capable de les gérer.
Mike Berlyn : Je pense que la technologique permet de créer des produits qui donnent un cap au marché et séduisent de nouveaux clients — des gens dont le besoin, ou le désir, est de vivre une expérience qu'ils ne peuvent vivre que sur ordinateur. Dans le futur, j'aimerais explorer le "scénario" comme une structure, chose encore impossible à ce jour en raison de l'état des technologies actuelles. Le scénario ne pourra devenir une variable que quand le stockage sera accru et que les moteurs seront plus évolués. Je verrais bien un scénario devenir un réseau de possibilités.
Corey et Lori Ann Cole : Nous espérons nous aussi que les améliorations porteront sur l'histoire, la conception, et l'apparence : des histoires plus riches, des interactions plus réalistes entre les personnages, etc. Passé un certain point -que nous avons déjà atteint-, la technologie, n'a plus vraiment d'importance. En revanche, la créativité et la bonne compréhension des différences entre "films interactifs" et jeux a une grande importance ! L'industrie s'oriente désormais vers les auteurs et les designers professionnels, et cela va dans le bon sens.
Ron Gilbert : Je pense que le scénario n'a rien à voir avec le technologie. Ils n'ont quasiment aucun rapport l'un avec l'autre. Ce ne sont ni les CD-ROM, ni le VGA qui feront la différence ; c'est apprendre comment raconter une histoire. N'importe qui doté d'un peu de talent peut raconter une superbe histoire au format 160 x 200 pixels, 4 couleurs, et faire tenir son jeu sur deux disquettes.
Roberta Williams : Je n'ai pas dit qu'il n'était pas important de disposer d'un bon scénario ! Bien sûr que c'est important.
Dave Lebling : Je ne te prêtais pas ces propos. Tu connais très bien le sujet ! Je pense simplement que l'importance que l'on accorde à l'apparence tient au fait que nous savons déjà comment soigner l'apparence d'un jeu. Donnez-nous une machine plus puissante ou un lecteur de CD-ROM, et hop! un jeu à l'apparence léchée ! Là où nous pêchons encore, c'est sur le scénario. Je ne crois pas que les scénarios actuels fassent plus "réels" que ceux d'il y a cinq ou huit ans. Seront-ils meilleurs dans cinq ans ? Je l'espère mais j'en doute. Nous ne pouvons nous contenter de copier les autres médias sans nous concentrer sur l'interactivité et les contrôles qui rendent le nôtre si particulier. Si nous travaillons à l'amélioration des contrôles et à l'illusion que ce sur quoi nous interagissons est aussi riche que la réalité, alors nous serons capables de réaliser une chose qu'aucun autre média ne peut proposer.
Corey et Lori Ann Cole : Nous n'avons jamais utilisé l'ordinateur comme un véritable medium [NdT : singulier de média(s)].
Steve Meretzky : Vous ne l'avez donc jamais utilisé pour contacter le monde des esprits ? [note 1]
Corey et Lori Ann Cole : Certaines choses réalisables sur un ordinateur ne peuvent l'être sur les autres médias. Malheureusement, la tendance est à l'abandon de l'ordinateur au profit des photos scannées et des techniques d'animation traditionnelle issue des films. [2] Si cette tendance se confirme, il risque de se passer un long moment avant que nous réalisions vraiment ce qui ne peut être accompli que par un ordinateur. Un petit exemple : le très critiqué système de sauvegarde, technique merveilleuse de voyage dans le temps -et dans l'esprit-, peut devenir un outil précieux plutôt qu'un besoin impérieux.
Bob Bates : Je suis d'accord. Vous ne pouvez pas demander à un peintre de l'Art Institute de Chicago de peindre une autre scène. Vous ne pouvez pas demander à un chanteur du Met de changer sa chanson. (Enfin si, vous pouvez, mais vous n'obtiendrez qu'un froncement de sourcils.) L'essence d'un jeu sur ordinateur est le fait que c'est le joueur qui contrôle l'action. L'intérêt de créer de belles musiques et de beaux graphismes est d'aider le joueur à se sentir investi dans le jeu.
Q : Je remarque que bon nombre de jeux sortis récemment proposent 256 couleurs. Cela veut-il dire que le VGA en 256 couleurs va devenir le standard ? Quelqu'un a-t-il déjà envisagé de réaliser un jeu au format 640 x 480 pixels et 256 couleurs ? Et comment connaître la configuration moyenne du PC des joueurs ?
Bob Bates : L'étude de marché qui vise à identifier le matériel des joueurs est abominable. En ce qui nous concerne, nous publions nos jeux en EGA haute-résolution [NdT: lol], ce qui nous permet d'afficher de très bons graphismes sur un standard assez répandu, ainsi que des textes dotés de jolies et fines lettres en lieu et place des grandes lettres grossières et démodées.
Steve Meretzky : Je reçois souvent des lettres grossières de ma tante Matilda.
Guruka Singh Khalsa : Nous avons fait des recherches pour déterminer le parc matériel des joueurs, et il s'avère qu'un nombre important des clients de Sierra disposent de cartes VGA ; environ 60% à ce jour. Pour ce qui est du 640 x 480 en 256 couleurs : il n'existe aucun standard matériel supportant cette résolution puisqu'il ne correspond à aucun mode VGA officiel. Vous ne pourrez voir de jeux supportant cette résolution que quand les moteurs auront gagné en puissance — il en faut pour animer tous ces pixels ! — et quand elle sera devenue un mode VGA officiel. L'ensemble des cartes SVGA utilisent des appels [NdT: fonctions?] quelques peu différents. [NdT : je n'ai personnellement pas compris cette phrase]
Dave Lebling : Le PC standard d'entreprise est un 386 VGA doté de 2 ou 4 mégas de mémoire, et d'un disque dur de 40 mégas. Or le standard familial rattrape généralement le standard d'entreprise au bout d'une poignée d'années. Et cela va arriver vite, du fait de l'interface Windows.
Q : Certain(e)s d'entre vous prévoient-ils (elles) de ne plus développer que pour l'environnement Windows, ou du moins d'en tirer parti ?
Dave Lebling : Le public adopte massivement Windows, qui est ainsi en passe de se retrouver leader du marché. Le dernier Windows en date est le premier à permettre la création de logiciels de qualité professionnelle. Il s'est vendu 1 million de copies de Windows. Il est encore trop tôt pour y miser gros. Cela arrivera dans quelques années, quand le portage sera facilité, qu'une interface graphique aura été créée, avec de la mémoire virtuelle, etc., etc. Mais il est encore trop tôt.
Q : Avec l'arrivée des interfaces sans interpréteur et des sons numérisés, il semble que le texte pourrait bien complètement disparaître des jeux d'aventure. A l'origine, évidemment, les jeux d'aventure n'étaient basés que sur du texte. Qu'a-t-on gagné et qu'a-t-on perdu au passage ? Est-ce que les jeux d'aventure vont conserver cet aspect "littéraire" du jeu vidéo ?
Bob Bates : Il est évident que, dans le métier, le texte est devenu un genre de gros mot. Mais je crois que le vrai problème a toujours été le clavier, une vraie barrière pour les personnes étrangères à la saisie. Ajoutons à cela les problèmes posés au joueur par un designer qui ne tient pas compte des autres périphériques de saisie existants pour permettre la résolution des puzzles. Je pense que les jeux afficheront toujours du texte à l'écran. Nous espérons avoir répondu aux attentes avec notre nouvelle interface, mais il est difficile d'obtenir des retours dans la mesure où notre premier jeu ne sortira pas avant au moins un mois...
Corey et Lori Ann Cole : Le texte ne disparaîtra pas. Et pourquoi le faudrait-il ? Les jeux en mode texte cohabiteront avec les jeux dépourvus d'interpréteur et les jeux sans texte. Et à quoi bon être un jeu "littéraire" ? Être un jeu divertissant est le plus important ! J'aime les mots. Lori aime les mots. Mais les mots ne suffisent plus quand on aime aussi manger — et nous aimons manger. Nous aimons aussi les graphismes et la musique, et d'autres choses tout aussi divertissantes, donc ça n'est en aucune cas une perte.
Roberta Williams : Il est vrai que dans les livres, les histoires peuvent être plus développées, qu'elles peuvent impliquer d'avantage le lecteur, et s'avérer plus intéressantes que dans les films. Je crois qu'il y a encore de la place pour les livres interactifs. Gageons qu'il existe une entreprise qui omettra la partie "vidéo" pour ne plus se concentrer que sur de bonnes histoires textuelles et interactives. Elle proposera ainsi des histoires plus développées que celles des jeux d'aventure graphiques. Les jeux d'aventure de demain vont commencer à ressembler à des films interactifs. L'industrie du cinéma est un business plus lucratif que l'industrie du livre. Le business du jeu d'aventure va, dans l'ensemble, suivre cette tendance. A ce jour, les jeux d'aventure sont les jeux vidéo les plus littéraires qui soient, mais cela pourrait changer dans la mesure où le texte va perdre du terrain dans les années à venir, remplacé par les dialogues audio, les effets sonores, et l'animation. Mais je prédis qu'un jour, un studio saisira l'énorme opportunité de proposer à nouveau des livres interactifs très bien écrits et réalisés. Il visera une audience plus modeste, mais qui vaudra les efforts investis.
Dave Lebling : Je te trouves bien optimiste au sujet d'un hypothétique studio qui ne produirait que des produits basés sur le texte. Nous délaissons les livres interactifs au profit des films interactifs. Je ne suis guère optimiste quant à la survie commerciale du texte, à une ou deux exceptions près. [note 3] Contrairement à la science-fiction, vous n'êtes pas obligé de suivre une tendance jusqu'à ce qu'elle devienne asymptotique. Le texte ne disparaîtra pas, mais son rôle sera réduit dans les succès commerciaux. Les graphismes et les sons resteront à jamais.
Al Lowe : Avec l'arrivée des dialogues audio, c'est comme si tous ces merveilleux inserts de dialogue avaient disparu ! Vous savez, ceux-là même qui rendent les films muets si littéraires ! Nous parlons d'un média visuel ! Il n'y a pas de demande pour des films muets ; la plupart des américians ne sont même pas capables de regarder un film en noir et blanc. Oui, les jeux textuels sont plus "littéraires". Et alors ?
Mike Berlyn : En ce qui concerne l'avenir du texte, je parie qu'il ne disparaîtra pas. Mais je doute qu'il soit indispensable à ce genre de jeux. Le jeu d'aventure que je suis en train d'achever ne comporte que très peu de texte, et son rôle se résume à rappeler ce qui se passe à l'écran, ainsi qu'à améliorer l'expérience de jeu en proposant la saisie de mots au joueur. Je maintiens qu'il n'est pas indispensable. J'ai réalisé deux projets de jeux complètement dénués de textes, bien qu'aucun des deux ne se soient concrétisés.
Bob Bates : Je ne pense pas que la disparition du texte en sortie pose problème au designer ; je pense que c'est celle du texte en entrée qui lui coûte. Il est difficile de créer des puzzles ardus qui peuvent être résolus à l'aide de la seule souris. Et sans puzzles — sans puzzles ardus — vous ne faites que regarder un film sur un tout petit écran. Les jours du jeu d'aventure textuel sont comptés. Les graphismes sont là pour rester, et ce n'est pas une mauvaise chose, tant qu'ils apportent quelque chose à l'histoire plutôt qu'ils ne la remplacent.